samedi 14 juillet 2012

« La Soirée » de Montréal Complètement Cirque : merveilleux cocktail contre la déprime


Que vous soyez déprimés, épuisés ou que vous souffriez de fièvre en pleine canicule depuis 24 heures (c’est moi ça…), sachez qu’il existe un moyen de tout oublier, de retrouver le sourire et de profiter d’un incroyable regain d’énergie grâce à « La Soirée », présentée au festival Montréal Complètement Cirque, jusqu’à dimanche.

Présentée sous forme de cabaret, « La Soirée » débute avec le personnage nommé Le Gâteau Chocolat, mi-drag queen, mi-femme à barbe, dont la voix basse de chanteur d’opéra ouvre le spectacle en fredonnant un air de comédie musicale, dessinant ainsi un sourire aux lèvres de tous les spectateurs de l’Olympia. Vient ensuite un duo de gentlemen équilibristes, qui se chargent d’impressionner la foule avec leur numéro, tout juste avant de se débarrasser de leurs complets bon chic, bon genre, et de présenter leur fierté toute britannique aux yeux de tous.

Les deux hommes sont suivis d’un maladroit personnage sur patins à roulettes, simili jongleur de machettes, qui revêt ses plus beaux atours féminins (souliers à talons surcompensés inclus), avant d’embarquer sur un « bâton sauteur » (pogo stick) qui l’envoie dans toutes les directions. Assumant le rôle du gaffeur de service, il finit lui aussi par nous écarquiller les yeux.

Vient alors une divine section d’interaction avec le public, qui nous est offerte par une dame pleinement décidée à nous donner une leçon d’art dramatique en s’aidant d’un séduisant jeune homme issu du public. Après lui avoir donné un mot d’introduction à lire seul devant la foule, elle le rejoint sur scène avec une succession de répliques collées un peu partout sur son costume afin de recréer un moment de séduction dramatique. C’est simple, charmant et incroyablement divertissant.

Au cours de la soirée, le public montréalais a également droit à un numéro d'effeuillage iconoclaste, alors que son interprète cache un petit bout de foulard dans les endroits les plus inusités de son costume et de son corps… avant de revenir plus tard sur scène afin de pousser la chansonnette en espagnol. Légèreté et amusement sont au menu.

Les gentlemans équilibristes reviennent nous décrocher la mâchoire en individuel, Gâteau au Chocolat récite un nouvel air bien connu, ne se gênant pas cette fois pour se frotter et pour embrasser trois membres masculins de l’assistance, une jeune femme au regard hypnotisant y va d’un numéro de cerceaux d’une grande beauté, les marionnettistes montréalais, Serge Deslauriers et Enock Turcotte, font chanter et danser leur acolyte inanimée sur les rythmes de « If you could read my mind ». Et puis, il y a le « Bath boy », cet acrobate berlinois qui danse avec les sangles au-dessus et dans un bain sur pieds, habillé d’un jeans évidemment moulé sur sa musculature par l’eau qu’il survole. Sexy, coquin, en plus d’être vachement difficile à exécuter, son numéro réussit à surpasser tous les autres, alors qu’on se sentait déjà rassasié par tant de rires, de beautés, de surprises, d’émotions et d’originalité.

Bref, si vous cherchez quoi faire samedi ou dimanche soir, vous avez maintenant trouvé.

Par Samuel Larochelle, dit le Sage Gamin

La Soirée
L’Olympia
6 au 15 juillet
http://montrealcompletementcirque.com/fr/spectacles/27/la-soiree

vendredi 13 juillet 2012

« Petit Mal » à Montréal Complètement Cirque : 3 petits garçons qui jouent aux brutes


Pour quelques jours seulement, les Montréalais ont la possibilité de voir le cirque sous un nouvel angle, celui de la brutalité, du manque de raffinement et de la beauté nouveau genre, alors que les hommes du « Petit Mal » redéfinissent les codes circassiens en accumulant les ecchymoses, sous les yeux amusés des spectateurs.

Point de délicatesse et de fluidité dans cette nouvelle production de la troupe finlandaise Circo Aereo. Provoquant son lot de réactions antagonistes (on embarque avec enthousiasme ou on reste de glace en comptant les minutes qui nous séparent de la fin), le spectacle interprété par Rauli Kosonen, Petri Tuominen et Kalle Lehto part dans toutes les directions.

Le grand baraqué, le petit trapu et le petit mince se battent comme des enfants, se pourchassent sur de petits trampolines, se font des coups de cochon et nuisent à leurs numéros respectifs plus souvent qu’autrement. Après cinq minutes d’un numéro de mât chinois où le cœur des spectateurs est mis à rude épreuve, craignant de voir le petit mince s’écraser la tête sur le sol en manquant l’une de ses incroyables manœuvres, le grand baraqué décide qu’il en a assez des pirouettes aériennes et que le temps est venu de couper les câbles du dit mât, quitte à laisser tomber son partenaire dans le reste du décor. 

« Petit Mal » offre également au public une portion déguisée où le grand baraqué court après ses acolytes, soudainement transformés en cheval, de brefs instants où les deux petits se cachent à l’intérieur d’énormes pneus de tracteur en jouant les contorsionnistes, une section où les trois hommes jouent aux vedettes rock  en courant, dansant et gueulant pendant quelques minutes, un magnifique numéro de trampoline où le petit trapu vous coupera le souffle après trente secondes, et bien plus encore.

Bien que les capacités d’acrobates des trois hommes soient incomparables, que leur laisser-aller soit inspirant et qu’il soit de bon aloi de ne pas toujours offrir la même recette dramatique au public, on finit tout de même par se dire que leurs folies brutes auraient tout avantage à profiter des conseils d’un vrai travail de mise en scène. Resserrer par-ci, ajouter une transition par-là, s’assurer que tous les instruments du spectacle fonctionnent…

Au lieu d’offrir un bon petit spectacle original, le trio pourrait alors présenter au public du monde entier un grand spectacle dont on se souviendrait longtemps.

Petit Mal
Théâtre Outremont
12 au 15 juillethttp://montrealcompletementcirque.com/fr/spectacles/10/petit-mal 
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mercredi 11 juillet 2012

"RO-PU" à Montréal Complètement Cirque : quelques petits tours et puis s’en vont


La question à laquelle ont tenté de répondre les membres de la compagnie finlandaise Circo Aereo est la suivante : est-il possible de faire preuve de suffisamment d’ingéniosité pour rendre intéressant un spectacle uniquement composé de numéros tournant autour d’une corde ? À mon grand regret, la réponse est non. 

Qu’on me comprenne bien, la compagnie de cirque, que le programme de la soirée présente comme un des fleurons de l’exportation culturelle finlandaise, offre plusieurs belles trouvailles aux spectateurs de l’Usine C. Ironiquement, la plus intéressante de toutes est celle qui n’a pratiquement aucun lien avec la fameuse corde : soit la musique et les effets sonores imaginés par Tuomas Norvio. Tour à tour envoutantes, enlevantes et électrisantes, ses compositions nous hypnotisent et nous donnent envie de vérifier sur le Web s’il est possible de découvrir encore cet artiste fascinant.

Du reste, les trois interprètes de la soirée (Viivi Roiha, Sakari Männistö et Sanna Silvennoinen), présentent quelques bons numéros. Lorsqu’une projection vidéo d’équilibristes sur corde est projetée au mur et que les trois artistes reproduisent le tout, couchés au sol, on ne peut faire autrement que de sourire. Le numéro en duo avec la harpe aux sonorités divines, ainsi que les numéros plutôt typiques de corde suspendue, réussissent à attirer notre attention, sans pour autant nous impressionner.

La suite du spectacle se résume à jouer avec une corde, à faire un semblant d’ombres chinoises peu inspiré, à donner vie à cet énorme bout de ficelle sans réellement nous intéresser, le tout sans qu’aucune connexion ne soit établie avec les spectateurs. Outre les quelques sourires en coin de l’interprète masculin, jamais le public ne ressent de réelles émotions émanant des artistes.

Une fois le désir d’innover souligné, il ne reste pas grand-chose de ce spectacle du festival Montréal Complètement Cirque.


Par Samuel Larochelle, dit le Sage Gamin


RO-PU
11 au 14 juillet
Usine C
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mardi 10 juillet 2012

Critique de « Chantons sous la pluie » : une incroyable décharge d’énergie !


Deux ans après avoir présenté le succès retentissant de La Mélodie du Bonheur, Denise Filiatrault revient à la charge avec Chantons sous la pluie, version française de la comédie musicale inspirée du film de 1952, Singing in the Rain, où René Simard, Renaud Paradis et Marilou Morin jouent, chantent et dansent avec un enthousiasme hors du commun.

Campée à une époque où le cinéma parlant gagne du terrain au détriment du cinéma muet (un peu comme dans le film The Artist), Chantons sous la pluie met en scène Don Lockwood, acteur vedette qui tente de vivre la transition du Septième art avec succès. S’amourachant d’une jeune actrice qui lève le nez sur les films muets et tentant par tous les moyens de se libérer d’une co-vedette convaincue de se marier sous peu avec lui, puisque les magazines l'écrivent depuis des mois, Lockwood aura l’idée de développer un film musical afin de réussir son passage au cinéma parlé. 

Outre quelques faux pas, Denise Filiatrault relève l’énorme défi de monter Chantons sous la pluie, dans le cadre du Festival Juste Pour Rire : costumes éclatants, chorégraphies réglées au quart de tour, décors magnifiques qui se succèdent à un rythme infernal, acteurs-danseurs-chanteurs qui donnent tout ce qu’ils ont pour faire de ce spectacle un moment mémorable. 

En contrepartie, malgré tout le savoir-faire de l’interprète de Don LockWood en danse, en chant et en jeu, il manque une étincelle à Renaud Paradis pour que nous ne regrettions pas le charisme magnétique de Gene Kelly dans la version cinématographique de l’époque. De son côté, René Simard en impose avec son énergie et sa fouge, mais force et d’admettre qu’aux côtés de ses talents pour le chant et la danse, l’enfant-chéri des Québécois est tout sauf un acteur. Linéaire et faux dans son interprétation, Simard ne peut hélas pas mettre à profit sa grande expérience pour égaler la jeune Marilou Morin en naturel et en simplicité. 

Outre ces bémols du côté de l’interprétation et le fait que la première partie gagnerait à être resserrée aussi efficacement que la deuxième, le spectacle de Chantons sous la pluie demeure un grand succès. Les versions françaises des chansons « Singin’ in the Rain », « Good Morning » et « Make ‘Em laugh » sont enlevantes. La cohésion de l’ensemble de danseurs est fichtrement belle à voir. Et la soirée permet au public montréalais de goûter au talent comique de Pascale Desrochers, véritable star de la soirée. En jouant Lina Lamont avec une voix nasillarde et suraiguë, en profitant d’un sens du punch magistral et à nous rendant attachante cette actrice finie, qui est prête à tout pour ne pas tomber de son piédestal, Desrochers fait crouler de rire la salle à chacune de ses présences. On croirait voir un croisement entre Dominique Michel et Criquette Rockwell, du Coeur a ses raisons. 

Avec une production digne de Broadway, des interprètes dévoués et une envie irrépressible d’être de bonne humeur en sortant de la salle de spectacle, Chantons sous la pluie mérite amplement qu’on prenne trois heures de notre vie pour le découvrir. 

http://www.hahaha.com/fr/montreal/act/2850

Par Samuel Larochelle, dit le Sage Gamin
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dimanche 8 juillet 2012

« LEO » à Montréal Complètement Cirque : le moi du toi, son double et tout le reste


Au cours des dernières heures, j’ai compris pourquoi j’avais l’effervescence aussi palpable en assistant aux spectacles de Montréal Complètement Cirque. Non seulement le festival me confronte-t-il à des spectacles d’une qualité à couper le souffle, mais il me permet également de découvrir un univers artistique en entier, soit celui des meilleurs artisans du cirque mondial. Après avoir été renversé par « Séquence 8 », des 7 Doigts de la Main, voilà que LEO m’offre la possibilité de voguer sur un élan d’émotions inespéré. 

Créé par la troupe allemande Circle of Eleven, LEO est mis en scène par le Québécois Daniel Brière, directeur artistique du Nouveau Théâtre Expérimental et mieux connu comme « le papa de l’émission Les Parent ». Son idéateur et interprète solo, Tobias Wegner, nous apparait tout au long du spectacle dans une grande pièce vide, de forme rectangulaire, qui est placée à l’horizontale. Un peu plus loin, se trouve une autre pièce, tout aussi vide et rectangulaire, mais installée à la verticale. À la seconde où Tobias fait un mouvement dans son coin, une projection vidéo de lui-même « l’imite » dans la pièce d’à côté, nous donnant ainsi l’impression qu’un deuxième acteur-acrobate réalise les mêmes mouvements, mais dans un angle différent. Il arrive même qu’on hésite un bref instant entre l’efficacité de la projection vidéo et la possibilité qu’une force magnétique permette à un véritable Tobias-numéro-2 de marcher sur les murs, de se tenir sur un doigt et même… de voler.

Démarrant en douceur, Wegner découvre ensuite une série de chansons cachées au fond de sa valise, allant du funk au classique, en passant par un succès de Frank Sinatra. Augmentant la cadence et le degré de difficulté de ses mouvements, en nous donnant l’impression qu’il devient dont plus difficile pour son « double » de l’imiter, l’artiste se sert éventuellement d’une craie pour dessiner son univers en deux dimensions : chaise, table, chat, bocal de poisson, fenêtre, oiseau exotique. Malgré la simplicité du coup de crayon, on ne peut faire autrement que de croire à son nouvel environnement.

Peu à peu, s’articule une succession d’animations vidéo donnant vie à ses dessins, ainsi qu’à une série de doublons des projections de Tobias : pendant que la version réelle et originale s’exécute à droite, sa projection de gauche est accompagnée de plusieurs clones qui l’imitent en différé, un peu comme si les images dansaient la valse en reproduisant un canon de Pachelbel en vidéo.

Arrivant à nous amuser, à nous émouvoir et à nous faire découvrir une façon franchement différente de traiter la vidéo sur scène, Tobias Wegner et Daniel Brière peuvent se vanter d’avoir fait avancer l’art pour notre plus grand plaisir. Et croyez-moi, lorsque le Théâtre Outremont vous offre 60 minutes de splendeur et que le non-loin Bilboquet de l’avenue Bernard vous suggère l’extase en crème glacée quelques minutes plus tard, les raisons pour se passer d’un tel bonheur sont à toute fin inexistantes.

Par Samuel Larochelle, dit le Sage Gamin

LEO
Espace Libre - 30 octobre au 24  novembre

jeudi 5 juillet 2012

« Séquence 8 » des 7 Doigts de la Main : ce que l’humanité a de plus beau à offrir



Y a-t-il meilleure façon de vivre sa toute première incursion au Festival Complètement Cirque que d’avoir la divine impression d’assister à l’un des meilleurs spectacles de sa vie ? Grâce à la nouvelle création de la troupe Les 7 Doigts de la Main, intitulée « Séquence 8 », l’événement montréalais vient de se tailler une place dans le secteur peu fréquenté de mes coups de cœur impossibles à oublier.

Tout au long du huitième spectacle du clan des Sept, point d’histoire ou de fil conducteur à se mettre sous la dent. Shana Carroll et Sébastien Soldevila, tous deux à la mise en scène et à la direction artistique, optent plutôt pour un spectacle épuré, pratiquement sans décor, où le flafla et l’esbroufe ne sont pas les bienvenus. Comptant sur le talent de sept interprètes d’un calibre spectaculaire, le duo de créateurs nous en met plein la vue avec un alliage d’originalité, de plaisir contagieux et de complicité comme il s’en fait peu.

Les regards qui s’échangent sur scène sont si puissants de bonheur, d’intensité et de sincérité qu’ils pourraient suffire à eux seuls pour nous faire passer une magnifique soirée, mais voilà que la presque totalité des numéros nous impressionnent ou se permettent d’ajouter un petit quelque chose de nouveau à l'histoire du cirque. La force du groupe, dans toute la beauté de son interdépendance et de son interdisciplinarité, nous amène à croire que les membres de la troupe sont les plus meilleurs amis du monde et que leur complicité peut difficilement devenir plus grande. Les chorégraphies composées d’habiletés circassiennes et de mouvements empruntés à la danse contemporaine nous captivent le regard et nous décrochent la mâchoire à tous les détours. La musique envoûtante, aux allures de trames sonores cinématographiques des plus grands compositeurs, arrive à nous titiller l’âme et à nous chavirer le cœur. Les 5 jeunes hommes et 2 jeunes femmes, beaux et belles, amusés et amusants, concentrés et désinvoltes, font des 90 minutes de ce spectacle un instant mémorable de notre existence.

Assister à l’expérience « Séquence 8 », c’est accepter de perdre le contrôle de son non-verbal, entouré de parfaits inconnus : la pupille humide qui ne peut résister à toutes ces émotions brutes, le sourire charmé qui succombe à cette abondance d’humour et de candeur, les mains qui se joignent en prière devant la bouche pour retenir une série d’exclamations, les fesses qui s’installent sur le bout du siège pour ne rien manquer du grandiose et du sublime qui n’en finissent plus de les impressionner, les jambes qui se déplient sans réfléchir afin de participer à l’ovation, et ce, sans oublier les paupières qui se referment la nuit venue avec le sentiment d’avoir été témoins d'une parcelle de ce que l’humanité a de plus beau à offrir.

Par Samuel Larochelle, dit le Sage Gamin

SÉQUENCE 8
5 au 15 juillet / 30 octobre au 17 novembre
TOHU