samedi 31 décembre 2011

Les coups de cœur du Sage Gamin après 1 an d’existence

Il y a bientôt 1 an, je lançais ma plume dans la blogosphère avec l’ambition toute simple d’écrire plus souvent et de libérer mon esprit des millions d’idées qui m’assaillaient. Quelque 126 textes et plus de 85 000 pages vues plus tard – alors que je n’ai aucune tribune télé ou radio et que je ne possède pas la force de frappe des grands quotidiens, je tiens à le préciser – je sais désormais que je veux faire de la critique et de la chronique un métier. À l’écrit, à la radio et à la télévision. Voici un bref survol de mes coups de cœur en 2011.

Andromaque (théâtre)
Mitigé les 25 premières minutes par l’opacité de l’écriture de Racine et des enjeux tragico-grecs de la pièce, je me suis finalement laissé engloutir par une langue poétique puissante et un groupe d’acteurs dans une classe à part. J’ai hâte à ma prochaine pièce de Racine.
http://sagegamin.blogspot.com/2011/01/projet-andromaque-la-piece-ou-lon.html

Restless (cinéma)
Deux adolescents qui se rencontrent en assistant aux funérailles d’inconnus. Lui, il a perdu sa famille. Elle, elle n’a que 3 mois à vivre. Ils tombent amoureux et vivent chaque petit moment de la vie d’une façon toute particulière. Nullement cliché, d’une sensibilité extrême, deux jeunes acteurs qui font déjà partie des grands. On en ressort les joues mouillées de larmes. Merci au réalisateur Gus Van Sant.

Junkyard/Paradis (danse)
Jusqu’au mois de janvier dernier, j’avais peur de la danse, et tout particulièrement de la danse contemporaine. Je n’y connaissais rien et je n’y comprenais rien. Après avoir été renversé par Junkyard/Paradis, un monde s’est ouvert à moi. Dans l’année qui a suivi, j’ai goûté à une quinzaine de spectacles de danse (Agora de la danse, Grands Ballets, Édouard Lock, LADMMI, Cinquième Salle de la PDA). Merci Mélanie Demers. Merci MayDay.
http://sagegamin.blogspot.com/2011/01/junkyard-paradis-un-coup-de-poing-en.html
http://sagegamin.blogspot.com/2011/11/critique-de-junkyardparadis-lusine-c.html

Jorane (musique)
Une chanteuse malade et fichtrement congestionnée doit oublier ses repères et lâcher prise en redécouvrant les notes et les émotions de ses chansons à chaque instant. En présentant aux Montréalais la 1re du spectacle « Une sorcière pas comme les autres », Jorane nous a offert un pur moment de magie.
http://sagegamin.blogspot.com/2011/05/premiere-montrealaise-de-jorane-la.html

Ils dansent (télévision)
Depuis toujours, l’apprentissage et le travail d’un artiste me fascinent. Lorsque je ne possède pas l’art en question et que l’emballage visuel de l’émission est à jeter par terre, je deviens accroc. Les numéros finaux étaient impressionnants, originaux et quelques fois très émouvants. Ils Dansent ne représente pas la réalité du milieu à proprement parler, mais c’est une expérience de vie fascinante qui fait de la très bonne télévision.

Villes Mortes (théâtre)
Qu’ont Pompéi, Gagnonville, Kandahar et le Quartier DIX-30 en commun ? Le talent de conteuses des actrices de ce merveilleux spectacle de la salle Jean-Claude Germain. Un texte franchement réjouissant.
http://sagegamin.blogspot.com/2011/04/villes-mortes-note-presque-parfaite.html

La Bohème (opéra)
Parce qu’elle a enfin réussi à me fermer le clapet, moi qui affirmais si souvent que les chanteurs d’opéra capables d’interpréter un personnage sont quasi inexistants. La Bohème, c’est des voix du tonnerre, des émotions à la pelletée, des enjeux humains auxquels on croit et une mise en scène ingénieuse. Je n’ai jamais été aussi heureux de me taire.
http://sagegamin.blogspot.com/2011/05/la-boheme-lopera-de-montreal-enfin-des.html

The Three of Life (cinéma)
Un réalisateur qui capte le regard des acteurs comme nul autre. Une lenteur bienfaitrice. Un film que j’avais envie de revoir le lendemain. Un film qui habite.
http://sagegamin.blogspot.com/2011/06/critique-du-film-tree-of-life-lintimite.html

Faire des enfants (théâtre)
Le texte d’Éric Noël m’était rentré dans le cœur alors qu’il était présenté en simple lecture publique par le Centre d’auteurs dramatiques en janvier 2011. En plus de nous présenter une histoire troublante de vérité, la lecture de l’oeuvre m’a permis de découvrir l’actrice Geneviève Schmidt, qui a également volé la vedette dans Anna sous les tropiques, présentée au Rideau-Vert, l’automne dernier.
http://sagegamin.blogspot.com/2011/01/faire-des-enfants-jetais-la-le-jour-ou.html

SCHWARTZ – The Musical (comédie musicale)
Parler de viande fumée, de Montréal et du Québec, avec ironie, amour et humour, voilà le merveilleux défi qu’a relevé le Théâtre Centaur. Si Montréal avait les reins assez solides pour reprendre le spectacle chaque été pour les touristes, Schawartz – The Musical serait idéal pour découvrir et comprendre la métropole, un sourire en coin.
http://sagegamin.blogspot.com/2011/04/schwartzs-musical-vous-fera-tomber-en.html

Vu par hasard (télévision)
Vu Par Hasard est ma surprise télévisuelle de l’automne. Émission dédiée à l’art public, le projet de la femme-orchestre Suzanne Guy a permis au non-amoureux des arts visuels que je suis de profiter du discours poétique – et accessible – des artistes, en plus de découvrir un pan de notre culture qui m'était inconnu. La réalisation, le montage, l’habillage sonore, la musique et le souci du détail de Suzanne Guy sont en tous points remarquables.

The Dragonfly of Chicoutimi (théâtre)
Pour l’habile usage de la structure de la langue française avec l’anglais, pour l’originalité de la mise en scène, pour l’histoire touchante et surprenante, pour le Théâtre PàP qui ne fait rien d’autre que de me combler, de projet en projet.
http://sagegamin.blogspot.com/2011/03/dragonfly-of-chicoutimi-do-you-parler.html

Alexandre Désilets (musique)
Parce que c’était le plus beau cadeau que je pouvais me faire le soir de mon anniversaire : un spectacle de musique en plein air, un artiste inspiré, connecté, vibrant, qui dispose de 2 albums qui accompagnent ma vie depuis 3 ans.
http://sagegamin.blogspot.com/2011/06/alexandre-desilets-escalader-le-monde.html

Les Quatre Saisons et Cantata (danse)
Mon premier spectacle des Grands Ballets à vie a été un coup de cœur foudroyant. Le classique et le contemporain qui se font la bise. Un petit quelque chose de grandiose qui donne envie de découvrir les Grands Ballets encore et encore. Je n’ai pas manqué un de leurs spectacles depuis.
http://sagegamin.blogspot.com/2011/03/les-quatre-saisons-et-cantata-les.html

Hamlet (théâtre)
Pour Benoit McGinnis, un des acteurs les plus brillants de sa génération, qu’on prend plaisir à suivre dans chaque de ses projets, petits et grands.  Un classique qui rencontre la modernité avec brio.
http://sagegamin.blogspot.com/2011/03/hamlet-au-tnm-rencontre-au-sommet-pour.html

Audible (danse)
Grâce à cette jeune compagnie de Vancouver, qui mélange la danse contemporaine, le hip-hop, le jazz moderne, la capoeira et le karaté comme personne, j’ai pu faire abstraction de l’inconfort foudroyant de l’Usine C quand on mesure 1 pied de trop pour y être à l’aise. Un bijou.
http://sagegamin.blogspot.com/2011/04/audible-lusine-mentendez-vous-etre-sans.html

Blue Valentine (cinéma)
Parce qu’on sort de ce film complètement déboussolé face à ses propres convictions sur le couple et sur l’amour. Parce que c’est brutal de réalisme. Parce que Ryan Gosling. Parce que Michelle Williams.
http://sagegamin.blogspot.com/2011/01/blue-valentine-la-petitesse-des-grandes.html

Le Chemin des passes dangereuses (théâtre)
Utilisation époustouflante d’un espace théâtral non conforme (Bain St-Michel) pour un autre majestueux mariage de mots issus de l’imagination de Michel-Marc Bouchard.
http://sagegamin.blogspot.com/2011/05/le-chemin-des-passes-dangereuses-un.html

Deux ans de votre vie (théâtre)
Oui, c’est possible de parler du couple avec du nouveau. Oui, c’est possible que vous deviez gérer vos éclats de rire trop nombreux en vous trouvant dans la première rangée de la petite salle Jean-Claude Germain.
http://sagegamin.blogspot.com/2011/08/critique-deux-ans-de-votre-vie.html

Café de Flore (cinéma)
Un trip esthétique. Un trip musical. Une histoire qui dépasse la force du temps et qui suggère aux cinéphiles de ne pas essayer de tout rationaliser. Un Kevin Parent dont le charisme perce l’écran. Des images qui s’incrustent dans le fond de notre mémoire. La raison d’être du cinéma.

Ha! ah… (théâtre)
Merci au TNM d’avoir fait comprendre au rébarbatif en moi que la langue de Réjean Ducharme pouvait être 1000 fois plus jouissive que dans mes souvenirs de lecture obligatoire. Merci Anne-Marie Cadieux d’exister.
http://sagegamin.blogspot.com/2011/11/ha-ha-au-tnm-le-jeu-de-la-cruaute-naura.html

Blackbird (théâtre)
Ne pas avoir envie de détester un pédophile grâce au jeu plein d’humanité de Gabriel Arcand. Ne pas savoir quel camp croire. Ne plus savoir si on doit choisir. Ébranlant de non-certitudes.
http://sagegamin.blogspot.com/2011/09/critique-de-blackbird-au-prospero-le.html

Ingrid St-Pierre (musique)
Je l’écoute, je la chante depuis des mois chaque fois que les vocalises résonnent entre les murs de mon appartement, j’en parle à tout le monde, je la ris, je la pleure, je la souris, j’en suis presque fatiguant.
http://sagegamin.blogspot.com/2011/10/ingrid-st-pierre-la-voix-dange-dune.html
http://sagegamin.blogspot.com/2011/12/la-rentree-montrealaise-dingrid-st.html

Contre le temps (théâtre)
Croyez-le ou non, un critique est heureux quelques fois de n’avoir aucun bémol à relever. Des acteurs qui font flèche de tout bois, un texte captivant, une soirée qu’on n’oublie pas de si tôt.
http://sagegamin.blogspot.com/2011/11/contre-le-temps-au-theatre-daujourdhui.html

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RÉFLEXIONS SUR MA PRATIQUE ARTISTIQUE

La première impression
http://sagegamin.blogspot.com/2011/01/la-premiere-impression_09.html


Un jour, je ferai de ma maison un théâtre
http://sagegamin.blogspot.com/2011/01/un-jour-je-ferai-de-ma-maison-un.html

Les personnalités multiples de mes doubles croches
http://sagegamin.blogspot.com/2011/01/les-personnalites-multiples-de-mes.html

Rentrée hivernale 2011 : vision d’un ex-ado qui regardait 40 h de télé par semaine
http://sagegamin.blogspot.com/2011/02/television-rentree-hivernale-vision-dun.html

À 11 ans seulement, j’étais déjà un imposteur de la musique
http://sagegamin.blogspot.com/2011/02/11-ans-seulement-jetais-deja-un-parfait.html

Et si je vous révélais l’envers du décor de l’Opéra de Montréal ?
http://sagegamin.blogspot.com/2011/02/et-si-je-vous-revelais-lenvers-du-decor.html

Le Gumboot, cette danse qui a commencé à me sauver de moi-même
http://sagegamin.blogspot.com/2011/03/le-gumboot-cette-danse-qui-commence-me.html

Plus de 5 ans de ma vie à faire du théâtre avec Marie Laberge, Rita Lafontaine et les autres
http://sagegamin.blogspot.com/2011/03/plus-de-5-ans-de-ma-vie-faire-du.html

La commercialisation du talent ou le réflexe Star Académie
http://sagegamin.blogspot.com/2011/05/la-commercialisation-du-talent-ou-le.html

Le Yin et le Yang du Sage Gamin en Chine
http://sagegamin.blogspot.com/2011/08/le-yin-et-le-yang-du-sage-gamin-en.html

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Le top 10 des textes les plus lus sur le blogue du Sage Gamin en 2011 :

1.    17 façons de trouver la femme, dont 9 que je ne veux jamais oublier – LECTURE
http://sagegamin.blogspot.com/2011/02/17-facons-de-trouver-la-femme-dont-9.html

2.    Sortie du 8e Aurélie Laflamme : à India Desjardins, mon extra-terrestre préférée – LECTURE – TRANCHE DE VIE
http://sagegamin.blogspot.com/2011/09/sortie-du-8e-aurelie-laflamme-india.html

3.    Un jour, je ferai de ma maison un théâtre – THÉÂTRE – TRANCHE DE VIE
http://sagegamin.blogspot.com/2011/01/un-jour-je-ferai-de-ma-maison-un.html

4.    La première impression – PRÉSENTATION de mon moi-même
http://sagegamin.blogspot.com/2011/01/la-premiere-impression_09.html

5.    Rentrée hivernale 2011 : vision d’un ex-ado qui regardait 40 h de télé par semaine – TÉLÉVISION ET TRANCHE DE VIE
http://sagegamin.blogspot.com/2011/02/television-rentree-hivernale-vision-dun.html

6.    Karine Vanasse essaie de sauver la pièce In ExTREMIS d’un échec lamentable –THÉÂTRE
http://sagegamin.blogspot.com/2011/02/karine-vanasse-essaie-de-sauver-la.html

7.    « Les bonnes filles plantent des fleurs au printemps » : la fragilité de l'abandon en écriture - LECTURE
http://sagegamin.blogspot.com/2011/09/les-bonnes-filles-plantent-des-fleurs.html

8.    Cœur de cœur pur et simple pour le roman « La tendresse attendra » - LECTURE
http://sagegamin.blogspot.com/2011/10/coup-de-cur-pur-et-simple-pour-le-roman.html

9.     X-Men – First Class : il était une fois des enfants mutants - CINEMA
http://sagegamin.blogspot.com/2011/06/x-men-first-class-il-etait-une-fois-des.html

10.  « À toi », de Kim Thuy et Pascal Janovjak : écrire un roman comme on fait l’amour – LECTURE – TRANCHE DE VIE
http://sagegamin.blogspot.com/2011/09/toi-de-kim-thuy-et-pascal-janovjak.html

mardi 27 décembre 2011

Mission Impossible 4 : la franchise est définitivement relancée !


Beaucoup moins présent sur les grands écrans depuis quelques années, Tom Cruise reprend du service sous les traits de l’agent Ethan Hunt pour le quatrième volet de la série Mission Impossible. Si l’on fait abstraction du manque d’originalité des scénaristes qui ont cru bon nous replonger dans la bonne vieille peur du méchant Soviétique, « Mission Impossible 4 : Ghost Protocol » est possiblement le meilleur film de la série.

Malgré le léger manque d’originalité du contexte général, MI-4 est un film d’action qui se paie le luxe d’un scénario qui tient la route, tout en étant rempli de gadgets, de batailles, de cascades et d’explosions. Sans être aussi recherchée que celle du thriller « The Debt », l’histoire de MI-4 a de quoi nous divertir sans nous abrutir pendant plus de deux heures.

Libéré d’une prison moscovite au début du film, l’agent Hunt rejoint de nouveaux collaborateurs qui doivent se débrouiller sans la structure toute puissante du service « Mission Impossible », qui vient d’être désavouée par le gouvernement américain. Travaillant de façon indépendante afin de déjouer les plans d’un Russe qui espère déclencher une guerre nucléaire, les membres de l’équipe d’Ethan Hunt sont eux-mêmes pourchassés par d’autres Russes. Ceux-ci étant convaincus que Hunt et les siens sont responsables de la destruction d’une partie du Kremlin.  

En nous offrant le visuel mémorable du pouvoir russe qui s’écroule, une course folle dans les rues de Mumbai, l’ascension vertigineuse de la plus haute tour du monde à Dubaï, une panoplie de nouveaux gadgets, quelques clins d’œil aux volets précédents des Missions Impossibles, un techno geek débutant qui commet son lot d’erreurs et une mission dont la réussite ne nous semble jamais assurée, le réalisateur Brad Bird et son équipe font de MI4 une réussite quasi totale.

On veut une suite.

Par Samuel Larochelle, dit le Sage Gamin
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Textes sur la musique, la lecture, le théâtre et la danse dans les archives de droite.

Textes sur le cinéma :
"In Time" : beaucoup doivent mourir pour que certains soient immortels
"French Immersion" : la honte, d'un océan à l'autre
"L'Affaire Rachel Singer / The Debt" : le thriller surprise de l'été 2011

"One Day" : l'étincelle amoureuse d'une amitié qui traverse le temps
"Rise of the planet of the apes" : divertissante, la laideur humaine ?
"Starbuck" : une immense bouffée d'air frais et d'amour filial
"The Tree of Life" : l'intimité de la vie mise en images
"GERRY" : à voir avec les yeux du coeur
"X-Men - First Class" : il était une fois des enfants mutants
"Des hommes et des Dieux" : partir ou bien mourir
Dossier Oscars - "Biutiful" fait-il le poids face à Incendies ?
"Funkytown" : de fascinantes lumières disco qui finissent par brûler...
"Somewhere" : une cinéaste qui se regarde réfléchir
"Blue Valentine" : la petitesse des grandes déchirures

vendredi 16 décembre 2011

« Pourquoi pas ? » chez Duceppe : l’équivalent d’un téléroman joué sur les planches

L’amour est-il possible à tout âge ? Voici la question que s’est posée le dramaturge Norm Foster en écrivant « Pourquoi pas ? », présentée au Théâtre Jean Duceppe jusqu’au 4 février. Même si sa pièce a tout d’un téléroman, l’auteur semble avoir trouvé le moyen de déranger la réflexion des spectateurs sur le sujet.

Dans « Pourquoi pas ? », Bob est amoureux de Jacqueline, Jacqueline est mariée et le mari de Jacqueline est le patron de Bob. Réussissant à tomber amoureux de la belle, même s’il ne l’a vue que 3 fois en 25 ans, Bob le maladroit, l’insignifiant, le tenace, l’attachant, le rigolo et le charmant, se lance à la poursuite de celle qui fait vibrer son cœur, le jour où il apprend que le patron/mari est décédé. S’en suivent alors 150 minutes de rencontres reconstituées, de partys de Noël d’entreprises, de maris et de femmes qui ne sont pas faits les uns pour les autres, de réflexions clichées sur l’art et la vie, et j’en passe. Sur papier, la trame de fond de « Pourquoi pas » est affreusement conventionnelle et, outre la ténacité de Bob pour obtenir ce qu’il veut, rien dans le propos de Norm Foster ne devrait nous faire réagir.

Pourtant, il suffit de tendre l’oreille à l’entracte pour réaliser que nombreux sont les spectateurs qui se questionnent sur le couple, sur la fidélité, sur le sens de la famille et sur l’amour chez les gens de l’âge d’or. Le texte a beau être un ramassis d’idées reçues et de banalités, il réussit tout de même à atteindre son but avec une large partie des spectateurs.

L’énergie incontestable de Claude Prégent et la facilité avec laquelle Pauline Martin alterne entre le drame et la comédie y sont probablement pour beaucoup. L’actrice profite d’ailleurs des meilleures lignes écrites par Foster pour faire éclater de rire l’assistance à de nombreuses reprises.

Les craintes, les peurs et le mariage déchu de Jacqueline ont été racontés 1000 fois. La persévérance infatigable Bob est aussi attendrissante que grotesque. Les décors et la mise en scène n’inventent rien. Pourtant, on sourit, on se détend et on se surprend à se laisser charmer par l’ensemble.

Au fond, « Pourquoi pas » est peu comme un film attrapé au hasard à 10 h 22 un dimanche matin de décembre. On pourrait zapper sans ne rien manquer, mais le fait d’y rester nous apporte tout de même quelque chose de simple et de réconfortant.

Par Samuel Larochelle, dit le Sage Gamin

Duceppe : 14 décembre au 4 février
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Textes récents sur les arts de la scène :
DANSE : Mon 1er Casse-Noisette à vie : de la ouate pour le coeur

jeudi 15 décembre 2011

L’art de renouer véritablement avec l’essence de Noël, version Maryse Letarte

Bien peu d’artistes peuvent se vanter d’avoir créé des chansons de Noël originales qui nous réchauffent le cœur aussi bien, sinon mieux que les classiques de nos aïeuls. L’auteure-compositrice-interprète Maryse Letarte fait partie du cercle restreint des créateurs qui en ont tous les droits. Pour vous en convaincre, dépêchez-vous d’assister à l’une des représentations que la chanteuse donne à la Cinquième Salle de la Place des Arts, jusqu’au 23 décembre, afin de goûter au côté fabuleux de la saison hivernale et de vous laisser bercer par l’essence du temps des Fêtes.

Mercredi 14 décembre, c’était soir de première pour Maryse Letarte et ses musiciens (Amélie Mandeville, Marc Papillon-Ferland, Marc-Antoine Olivier, Justin Allard et Christine Giguère). La nervosité était palpable. Pendant 5 ou 6 chansons, Letarte et les siens semblent avoir opté pour une allure académique aux accents bien carrés afin de contrôler le tout. Peu complices, légèrement coincés, nous laissant sentir leur métronome intérieur sans le vouloir, les 6 artistes ont réellement pris leur envol à 3 chansons de la fin de la première partie. S’est alors présenté un léger déclic qui a convaincu leur fébrilité d’aller prendre une marche, permettant ainsi au talent d’interprète de Maryse Letarte de rendre justice à la virtuosité de ses compositions.

Réussissant à mélanger la plupart des chansons des albums « Des pas dans la neige » et « Ni le feu ni le vent » qui nous ravivent le cœur depuis quelques années déjà, Maryse Letarte finit par laisser toute la place à sa simplicité désarmante, à sa désinvolture rafraichissante et à son charme timide. Invitant un spectateur à jouer de l’essoreuse à salade ou regardant du coin de l’œil son batteur offrir la chance à un petit blondinet de jouer du triangle le temps d’une chanson, Letarte ouvre enfin la porte à ce qu’elle souhaite nous transmettre avec ses chansons et son spectacle : nous faire oublier la course au cadeau idéal, taire nos angoisses, nous remettre l’humanité à la bonne place, nous rappeler l’époque où il faisait bon de se rassembler et nous transmettre une énorme dose d’amour.

Malgré des débuts hésitants, le pari de Maryse Letarte est plus que réussi.

Que la période des Fêtes commence !

Par Samuel Larochelle, dit le Sage Gamin

Écoutez des extraits de chansons et réservez vos billets via http://www.maryseletarte.com/concerts/

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dimanche 11 décembre 2011

Mon 1er Casse-Noisette à vie : de la ouate pour le cœur

Lorsque les festivités de Noël s’étendent sur la métropole, plusieurs traditions du milieu culturel refont surface : les Contes Urbains pour le théâtre, le spectacle Décembre pour la chanson et l’incontournable Casse-Noisette, ce merveilleux rêve dansant que les Grands Ballets canadiens offrent à 15 reprises jusqu’au 30 décembre à la salle Wilfrid-Pelletier. Même si le spectacle a été chorégraphié par Fernand Nault en 1964, ce n'est que samedi soir dernier que j'ai assisté à mon premier Casse-Noisette ! Nul besoin de vous dire que mon cœur d’enfant s’est laissé bercer par les airs de Tchaïkovski en laissant mes yeux s’émerveiller devant la magie de l’imaginaire.

Malgré quelques prouesses chorégraphiées particulièrement impressionnantes, mon intellect n’a pas retenu de Casse-Noisette les qualités techniques des danseurs de pointes. De la première à la dernière minute, la féérie de l’enfance a pris toute la place. La petite Clara reçoit un Casse-Noisette en cadeau le soir de Noël, elle refuse de passer la nuit sans son nouveau jouet, celui-ci prend vie sous les yeux de la jeune fille et la transporte au pays des neiges, au royaume des bonbons et l’invite à faire un petit tour du monde en assistant aux traditions dansantes de plusieurs pays du globe.

Tous les éléments des décors de Peter Horne et des costumes de François Barbeau ont été imaginés pour nous plonger dans un univers où le fabuleux côtoie l’incroyable. Même les plus grincheux des grincheux ne pourront résister à l’étincelle festive des Grands Ballets canadiens de Montréal. La succession de tableaux de ces artistes danseurs permet au temps des Fêtes de s’installer pour de vrai dans le cœur de petits et grands. 

Casse-Noisette remplit l’énorme salle Wilfrid-Pelletier chaque année depuis des décennies en réussissant à toucher toutes les générations et toutes les cultures. Voilà bien une tradition qui transcende à peu près tout. Que vous soyez du genre à gigoter sur le bout de votre siège en entendant une partition musicale qui fait vibrer votre cœur chaque fois que vous revenez voir le spectacle ou que vous fassiez la rencontre du travail de ce vaste groupe de danseurs, de figurants et d’artisans pour la première fois, il est bien difficile de ne pas quitter la Place-des-Arts  avec le cœur dans la ouate, le pas léger et la tête pleine des airs de Tchaïkovski.

Du bonbon !

Par Samuel Larochelle, dit le Sage Gamin 
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Textes récents sur les arts de la scène :
THÉÂTRE : La tradition des Contes Urbains revient nous ravir et nous désoler à La Licorne


mercredi 7 décembre 2011

La rentrée montréalaise d’Ingrid St-Pierre dépasse toutes les espérances

Depuis un an, Ingrid St-Pierre accumule les premières fois : son premier album, son premier spectacle et sa première rentrée montréalaise effectuée hier soir au Cabaret La Tulipe, devant une salle enveloppée de douceur, d’humour et de tendresse.

Accompagnée du quatuor à cordes Quatr’Ailes, formé par Edith Fitzgerald, Joanie Turcotte, Sarah Martineau et Camille Paquette-Roy, Ingrid St-Pierre meuble son spectacle avec les magnifiques compositions de son premier album (Ma petite mam’zelle de chemin), ainsi que par de nombreuses créations qu’elle nous fait découvrir avec ravissement.

Possédant un sens de la ritournelle qui vient nous toucher droit au cœur, St-Pierre n’hésite pas à s’ouvrir sur sa vie de maladresses, d’aventures rocambolesques, d’amours qui enivrent et de chagrins qui désolent. À la seconde où elle ouvre la bouche, on a envie de l’avoir avec nous pour toujours, cachée quelque part dans le creux de notre mémoire, question de ne jamais oublier la quantité de fous rires qu’elle a provoqués, de larmes qu’elle a fait monter et de bijoux qu’elle a fabriqués.

Ingrid St-Pierre, c’est un talent indubitable pour le piano, la voix et la composition. C’est la capacité d’ouvrir une parenthèse dans une chanson pour nous expliquer un mot sans jamais couper l’émotion qui nous transportait quelques secondes plus tôt. C’est une chanteuse qui demande aux éventuels virtuoses du ukulélé de sortir de la salle avant de se commettre sur le minuscule instrument à cordes devant une foule conquise. C’est une jeune femme de 26 ans qui avoue avoir passé une partie de son adolescence à entonner des chants grégoriens dans les cathédrales et qui nous en livre un extrait d’une pureté incomparable. C’est une artiste unique qui se permet de s’éloigner une trentaine de secondes de son micro afin de conclure une chanson avec son âme comme seule accompagnatrice.

Ingrid St-Pierre, c’est également une interprète qui a jadis fait le tour des cafés de Trois-Rivières en s’appropriant quelques chansons de Metallica, Outcast, Britney Spears et des B.B., dont elle nous offre quelques extraits jouissifs à la toute fin.

On sort du premier spectacle d’Ingrid St-Pierre en se disant qu’après être tombé en amour en écoutant son premier album, il est désormais possible de fondre une fois de plus pour la blonde chanteuse en spectacle.

Consultez les dates de ses prochains spectacles, un peu partout à travers le Québec via : http://www.ingridstpierre.com/Default.asp?p=6

Par Samuel Larochelle, dit le Sage Gamin
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Textes sur la musique :
MUSIQUE - "Le désert des solitudes" de Catherine Major ou le talent brut d'une petite fleur du mal
MUSIQUE - Ingrid St-Pierre : la voix d'ange d'une petite luciole sur un high
MUSIQUE - Alexandre Désilets : escalader le monde
MUSIQUE - Les personnalités multiples de mes doubles croches

mardi 6 décembre 2011

La tradition des Contes Urbains revient nous ravir et nous désoler à la Licorne

Pour leur 16e édition, les Contes urbains réunissent les héros d’enfance de plusieurs Québécois en invitant quelques-uns des interprètes de la Souris Verte, de Félix et Ciboulette, de la Ribouldingue, de Fanfan et Dédé, des Zigottos et de Passe-Partout à nous livrer 3 superbes contes et 3 autres franchement décevants.

Précédant la prise de parole de Marcel Sabourin, Marie Eykel, André Richard, Anne Casabonne, Louisette Dussault et Jean-François Gaudet, deux musiciens ouvrent la soirée avec un pot-pourri des thèmes musicaux des émissions de notre enfance, avant de nous servir des intermèdes de quelques-uns des plus grands succès du temps des Fêtes avec une touche toute personnelle. Un petit délice.

Débutant la soirée avec un conte partiellement improvisé, Marcel Sabourin se permet d'affirmer à plus d’une reprise que « ça ne vous intéresse probablement pas… » aux spectateurs, question d’installer un faux-semblant d’interaction avec eux. Malheureusement pour le début de cette veillée qui dure plus de deux heures, le conte de l’ancien Professeur Mandibule ne nous intéresse effectivement pas. Arrivent alors les mots de la prolifique et talentueuse Chrystine Brouillet qui nous offre une histoire de tromperie proprette interprétée sagement par Marie Eykel, alias Passe-Partout.

Alors que Sabourin et Eykel sèment le début d’une impression dans notre tête, le troisième conte livré par André Richard confirme le tout : les trois acteurs sont généralement justes, mais leur rythme, leur sens du timing et leur débit appartiennent à une autre génération. Non pas que la génération du vidéoclip dont je suis issu ait un besoin d’effervescence insatiable, mais l’art de raconter qui est le leur n’arrive jamais à me toucher. Qui plus est, les 3 premiers textes effleurent à peine la thématique des festivités de Noël si chère aux Contes urbains depuis ses débuts.

Heureusement pour nous, Anne Casabonne sauve la première partie de la soirée grâce à l'histoire  écrite par Michel-Marc Bouchard. Relevant le pari de nous faire oublier son personnage de Claude Milonga (La Galère) en utilisant les mêmes qualités d’actrice qui lui permettent de marquer l’imaginaire à chacune de ses apparitions, Casabonne nous raconte une histoire de tuerie banlieusarde un jour de Boxing Day avec fougue, émotions et un talent inouï pour nous faire boire ses paroles.

Après une courte pause, les Contes urbains reviennent en force avec une Louisette Dussault pétillante, enflammée, libérée et touchante, qui nous raconte une histoire de femmes, une histoire de jumelles, une histoire comme il s'en fait peu. Notre bonheur continue de s’accroitre.

Se pointe alors la cerise sur le sundae, le point d’orgue, le conte parmi les contes, celui de Fabien Cloutier, rendu avec panache et simplicité par Jean-François Gaudet. Audace, humour désopilant, des rires à la pelletée, un univers hautement improbable, un acteur qui met toute la salle dans sa petite poche d’en arrière dès qu’il ouvre la bouche. Un véritable tour de force.

On sort de la Licorne avec un énorme sourire aux lèvres en se disant que l'édition 2011 des Contes urbains est à l’image des festivités de la plupart des gens : un savant mélange de sourires, de rires, d’attentes déçues, de clash des générations, de surprises et de nostalgie.

Une tradition dont on serait fou de se passer.

Par Samuel Larochelle, dit le Sage Gamin

La Licorne – 29 novembre au 17 décembre
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Textes récents sur les arts de la scène : 

mercredi 30 novembre 2011

Critique de « Junkyard/Paradis » à l’Usine C : c’est grave comme c’est beau !

Présenté deux soirs seulement à l’Usine C (30 novembre, 1er décembre), Junkyard/Paradis risque de bouleverser ceux qui le découvre et de renverser ceux qui le revoit. Ayant eu l’immense plaisir de tomber en amour avec la danse contemporaine grâce à la chorégraphie de Mélanie Demers en janvier dernier, je suis ressorti de ce furieux chaos encore plus ému que la première fois, troublé par le talent des danseurs de Mayday et enchanté de pouvoir encaisser autant de beauté en si peu de temps.

Junkyard/Paradis, c’est la déchéance et la reconstruction, l’être humain dans tout ce qu’il a de plus beau et de plus laid, une série de tableaux où la désolation fait un croque en jambes à l’émerveillement et une soirée où la douceur et la tendresse affrontent la cruauté aride de l’âme humaine. Profitant de la direction inspirée de Mélanie Demers, la danse contemporaine de Junkyard/Paradis embrasse le théâtre et la variété afin de mieux nous plonger dans la douleur de la représentation et de l’image.

Tout au long du spectacle, la scène de l’Usine C est habitée par une musique qui nous rentre dans le coeur et par des accessoires que les danseurs-acteurs-performeurs manient à leur guise : des poignées de Nutella qui salissent la beauté vulnérable de Brianna Lombardo, des conserves de tomates qui permettent à Jacques Poulin-Denis de s’automutiler et de retomber dans l’imaginaire innocent d’un enfant, du beurre d’arachides qui empatte le déchirement amoureux d’Angie Cheng ou des bouts de vêtements que l’un remet sur l’autre en guise de réconfort et de protection.

L’incandescente Brianna Lombardo est l’une des meilleures interprètes féminines qu'il m’ait été donné de voir, toutes danseuses et actrices confondues. Déjà fort impressionnant en janvier 2011, Jacques Poulin-Denis va encore plus loin qu’il y a un an lorsqu’il s'attaque au rôle d’animateur de soirée. De leur côté, Nicolas Patry, Angie Cheng et Mélanie Demers atteignent un stade supérieur de l’interprétation, profitant visiblement des 11 mois qui se sont écoulés depuis leur aventure à l'Agora de la danse afin de grandir en tant qu'humains et en tant qu'artistes.

Junkyard/Paradis nous offre une série de moments de grâce qu’on aimerait revivre encore et encore.

mercredi 23 novembre 2011

« Moi qui me parle à moi-même dans le futur » : tant de mots pour presque rien…



Après avoir présenté « Moi qui me parle à moi-même dans le futur » à guichet fermé pendant le FTA au printemps dernier, Marie Brassard revient jouer sa plus récente création sur la scène de l’Usine C jusqu’au 26 novembre prochain. Ironiquement, si l’actrice, conceptrice et metteure en scène se parle à elle-même dans le futur, plusieurs spectateurs se sont beaucoup ennuyés dans le présent.

En s’accompagnant des musiciens Jonathan Parant et Alexandre St-Onge, Marie Brassard invite les spectateurs à plonger dans son monde intérieur où l’enfant qu’elle était, l’artiste qu’elle est et la femme vieillissante qu’elle deviendra se parlent, se croisent et s’emportent. Composant et interprétant de splendides morceaux aux sonorités électro, les musiciens nous immergent dans une atmosphère euphorisante qui se marie avec grâce aux nombreuses projections vidéo. À plus d’une reprise, je me suis imaginé planer dans les rues de Montréal en écoutant le fruit de leur création bien spéciale. Non seulement cette idée m’apparaissait enveloppante et émouvante, mais elle me permettait également d’oublier quelques instants le texte qui était récité devant moi.

La pièce « Moi qui me parle à moi-même dans le futur » est écrite avec un vocabulaire trop littéraire pour le théâtre. La diction et l’interprétation de Marie Brassard donnent régulièrement des airs didactiques à sa création. Tout est trop prononcé et trop appuyé. Même si le spectacle a été présenté il y a plusieurs mois, le texte m’est apparu comme une première version non achevée qui pourrait aller beaucoup plus loin afin de profiter pleinement des idées principales qui sont fort intéressantes. L’idée d’abattre les limites de la temporalité, de retourner dans la poésie de l’enfance et de se laisser porter sans contrainte de réalisme est tout à fait attirante. Malheureusement, même si on essaie de se laisser aller dans l’espèce de candeur onirique qui nous est suggérée, on est constamment bloqué dans nos élans par un texte qui n’est pas suffisamment travaillé, des thématiques de base qui sont mal exploitées et un rendu qui laisse à désirer.

Au final, on demande à notre cerveau de faire abstraction des mots pour mieux se concentrer sur la musique et les aspects visuels de l’œuvre.

Par Samuel Larochelle, dit le Sage Gamin

Usine C – 23 au 26 novembre
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Textes récents sur le théâtre :
THÉÂTRE : "Ha ha!..." au TNM : le jeu de la cruauté n'aura jamais été aussi réjouissant !
THÉÂTRE-DANSE : "J'aimerais pouvoir rire" : le talent brut de la famille Laurier
OPÉRA - "Rusalka" à l'Opéra de Montréal : la petite sirène version soprano tourmentée
THÉÂTRE - "Contre le temps" à Aujourd'hui : l'art de rendre les mathématiques fascinantes
THÉÂTRE - "L'Affiche" à l'Espace Libre : se faire mitrailler la tête et le coeur pendant 2 heures
THÉÂTRE - "Mon Frère est Enceinte" à la Licorne : avant Oprah, il y a eu Johanna
THÉÂTRE - "Au Champ de Mars" au Rideau-Vert : est-ce que ça peut être drôle, la guerre ?
THÉÂTRE - "Dans l'ombre d'Hemingway" : les tourments d'inspiration d'un vieux lion

dimanche 20 novembre 2011

« Ha ha!... » au TNM : le jeu de la cruauté n’aura jamais été aussi réjouissant !

Oeuvre phare de l'auteur Réjean Ducharme, « Ha ha!.. » est actuellement présentée au TNM pour la 3e fois en 60 ans, après que les metteurs en scène Jean-Pierre Ronfard et Lorraine Pintal nous aient offert leurs visions respectives. Jusqu’au 10 décembre prochain, Dominic Champagne s’approprie le texte de Réjean Ducharme en compagnie d’un quatuor d’acteurs qui font de la cruauté le plus fabuleux des terrains de jeu.

Disons-le tout de suite, l’univers de Réjean Ducharme est loin d’être le plus facile à apprivoiser. En plus de prendre un malin plaisir à nous mener dans une direction avant de nous perdre en chemin, le dramaturge s’approprie la langue en lui faisant dire à peu près n’importe quoi. Après les vingt premières minutes de la pièce, qui sont nécessaires afin de se débarrasser de l’incrédulité et de l’incompréhension qui nous assaillent dès l'ouverture, les spectateurs goûtent à quelque chose de survolté, d’original et de franchement brillant.

Pour les besoins de « Ha ha!... », l’imaginaire incandescent de Réjean Ducharme a donné vie à Roger, un faux-poète qui possède autant de talent que nous avons de raisons d’apprécier son existence, Sophie, une femme qui recherche constamment la passion, la complication et le renouveau, Bernard, un alcoolique fini qui n’a plus rien de bon à offrir à la vie, et Mimi, une lente d’esprit qui souffre dès qu’on la touche. Deux couples vivant sous le même toit, quatre adultes ne se lassant pratiquement jamais du plaisir de jouer, de ne pas grandir, de ne pas suivre la ligne et de faire brûler les conventions, au risque de s’entre-déchirer et de se noyer dans le pathétisme de la cruauté.

Réjean Ducharme se permet de jouer avec les mots, les expressions, les structures de phrases, les consonances et tout ce que la langue met à sa disposition pour nous ébranler et nous divertir. Marc Béland et Sophie Cadieux nous prouvent une fois de plus qu’ils sont dignes des ligues majeures du théâtre québécois, alors qu’Anne-Marie Cadieux est une leçon de théâtre à elle seule. Investissement physique, laisser-aller, sens du timing, intériorisation de personnages peu communs, maîtrise d’une langue tordue et délirante, la distribution de « Ha ha!... » fait flèche de tout bois.

Profitant d’un talent incontestable pour la direction d’acteurs, le metteur en scène Dominic Champagne réussit à chorégraphier ce furieux chaos à la perfection. Les 4 acteurs qu’il a sous la main nous donnent l’impression de faire de l’improvisation maitrisée avec une virtuosité qui est à couper le souffle.

Bien que la pièce gagnerait à durer deux heures au lieu de trois, on sort du Théâtre du Nouveau Monde avec la conviction réjouissante d’avoir assisté à un événement théâtral qu'il nous était impossible de manquer.

Par Samuel Larochelle, dit le Sage Gamin

TNM – 15 novembre au 10 décembre
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mercredi 16 novembre 2011

« J’aimerais pouvoir rire » à l’Usine C : le talent brut de la famille Laurier

Si le public connait le talent d’actrice de Lucie Laurier depuis une petite éternité, il vient certainement de faire la rencontre avec celui, incontestable, pour la mise en scène. Jusqu’au 19 novembre, l’Usine C est le témoin privilégié de sa vision de la schizophrénie à travers la non-retenue des mouvements de son frère et de sa sœur.

Angela la danseuse et contorsionniste, petit bout de femme délicat et solide, arrive sur scène sous un majestueux tissu blanc recréant le mouvement des rêves et des pensées dénuées de limites de son frère Dominique, atteint de schizophrénie. Maitrisant un corps qu’elle fait bouger à la limite du possible, Angela épouse la folie des membres et de la psyché avec un laisser-aller libérateur et captivant. Arrive ensuite le fameux frère, Dominique, sur l’écran gargantuesque qu’est devenu le bout de tissu accroché au plafond. Il se raconte, se rappelle, son enfance en Colombie-Britannique, ses excès d’agressivité, le processus pour accepter le diagnostic de sa maladie. Frère et soeur partagent ensuite la scène. Angela exécute de splendides contorsions chorégraphiées sous les yeux attentifs de son frère, avant que celui-ci la rejoigne dans une danse endiablée, sans prétention et sans barrières, et la peigne sur un écran où sont projetées d’autres versions de leurs élans complices. On les sent s’amuser comme les enfants qu'ils ont déjà été : avec amour et sans jugement.

« J’aimerais pouvoir rire » mélange la danse aux arts visuels, le théâtre au documentaire et la poésie à la vie dans toute sa pureté, le tout supporté par une trame musicale envoûtante et enivrante.

Profitant du travail des interprètes qui sont complètement investis dans ce qu’ils font, la mise en scène de Lucie Laurier n’en finit plus de surprendre, d’émouvoir, de sensibiliser, de vulgariser et de fasciner. « J’aimerais pouvoir rire » est l’exemple parfait du laisser-aller contrôlé qui nous laisse sans voix.

Par Samuel Larochelle, dit le Sage Gamin
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mardi 15 novembre 2011

« Ficelles » : une chanson sur les fils de la mémoire qui s’étiole


Pas évident d’écrire une chanson sur la maladie et ses effets collatéraux. Semble-t-il que la talentueuse Ingrid St-Pierre (dont j’ai récemment vanté les mérites dans un billet précédent) a réussi à mettre en mots et en images les douleurs de l’Alzheimer avec une simplicité et une douceur qui vont droit au cœur.

Parce que 4 de mes proches souffrent d’Alzheimer, parce que c’est probablement la maladie qui fait le plus peur à l’amoureux des mots que je suis et parce que la simple idée d’oublier ou d’être oublié est aussi douloureuse que prévisible, je partage avec vous les paroles de la chanson « Ficelles » d’Ingrid St-Pierre. À écouter via http://www.youtube.com/watch?v=ea-_mR-EpsE&feature=results_video&playnext=1&list=PL20B500AE1CD44909

Les jours et les saisons
la couleur de mes yeux
les paroles des chansons
celles qu'on chantait à deux

Le chemin de ta maison
comment on se maquille les yeux
la fête de tes enfants
mais oublie pas mon nom

Tes souvenirs d'avant
tu sais je veillerai sur eux
je les rattraperai au vent
je te raconterai si tu veux

Je nouerai des ficelles
à tes souvenirs qui s'étiolent
et le jour où ils s'envoleront
moi j'en ferai des cerfs-volants
mais oublie pas mon nom

Je t’écrirai que je t'aime
partout dans la maison
et si tu m'oublies quand même
juste en-dessous y'aura mon nom
et je serai là pour de bon
et je serai là pour de bon

Je nouerai des ficelles
à tes souvenirs qui s'étiolent
et le jour où ils s'envoleront
moi j'en ferai des cerfs-volants
mais oublie pas mon nom

dimanche 13 novembre 2011

“Rusalka” à l’Opéra de Montréal : la petite sirène version soprano tourmentée

Deuxième production de l’Opéra de Montréal cette saison, Rusalka est directement inspirée du conte de La Petite Sirène, imaginé par Hans Cristian Handersen. Présentée à la salle Wilfrid-Pelletier pour 4 soirs seulement (12-15-17-19 novembre), l’œuvre du compositeur Antonin Dvorak est une des rares productions livrées en tchèque à se rendre jusqu’à nos oreilles.

Rusalka est une jeune nymphe des eaux, amoureuse d’un prince de la race des humains, qui néglige les conseils de son père en quémandant une malédiction à la sorcière Jezibaba afin de devenir humaine pour que le prince la voit, l’embrasse et l’enlace. Obnubilée par son amour, Rusalka assume un mauvais sort qui la rend muette, dénuée de ce qu’on appelle « la passion humaine », constamment privée de chaleur dans ses veines, et dont l’issue s’avèrera fatale si le prince se détourne d’elle.

Forte d’une remarquable présence scénique, la soprano Kelly Kaduce possède une voix qui glisse dans nos oreilles comme une splendeur d’émotions et de douceurs dont on ne se lasse jamais. Une voix qui se laisse immerger sous la mer, en pleine forêt ou dans un chic château grâce à l’utilisation des immenses écrans de projection LED HD. Bien que les transitions soient trop nombreuses, trop rapides et quelques fois maladroites, l’aspect visuel offert par les écrans est franchement impressionnant à plus d’une reprise. Bravo aux artisans de l’Opéra de Montréal qui osent sortir des sentiers battus un peu plus souvent qu’avant. Prière de continuer.

Malheureusement pour Rusalka, plusieurs aspects de la mise en scène et de la compréhension générale de l’histoire deviennent difficiles à suivre par moment (l'interaction des invités lors de la fin du bal au château ou les multiples conséquences de la malédiction), le spectacle de trois heures, divisé en trois actes, est franchement trop long et les chorégraphies dansantes des nymphes des eaux sont tout sauf originales.

N’empêche, la qualité du jeu de la toute distribution, les décors novateurs et la star Kelly Kaduce font de Rusalka une agréable soirée à la Place-Des-Arts.

Extrait du spectacle : http://www.operademontreal.com/fr/popup_fr.html?id=1198&indexGroup=4

Par Samuel Larochelle, dit le Sage Gamin
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jeudi 10 novembre 2011

“Contre le temps” au T. d’Aujourd’hui : l’art de rendre les mathématiques fascinantes

Évariste Galois, vous connaissez ? Il s’agit d’un mathématicien français dont les théories d’algèbre ont révolutionné la science et le monde bien longtemps après sa mort. Vous croyez que les mathématiques sont un sujet bien peu inspirant pour vous déplacer au théâtre ? Détrompez-vous. Ce jeune fou des chiffres et de la modernité arrive à faire converger le talent de l’auteure Geneviève Billette et de huit grands acteurs sous la direction de René-Richard Cyr.

Impossible de quitter le Théâtre d’Aujourd’hui sans avoir saisi que l’intensité, la fougue et les élans dévastateurs d’un mathématicien sont aussi violents et grandioses que ceux d’un écrivain. Le personnage d’Évariste Galois, interprété par un Benoit Drouin-Germain enflammé, physique et totalement investi, brûle de dépasser les limites de l’acceptable. Son Galois se bat contre le temps et contre une époque qui se croit en retard et qui ne voit d’utiles que les réflexions servant concrètement à aujourd’hui, et non à demain. Le jeune mathématicien improvise les abstractions afin de se surprendre et de révolutionner la modernité de la science. Autour de lui, un père qui rêve de la république, une mère qui veut le protéger et lui éviter les soucis de sa rébellion, une jeune femme amoureuse de lui alors qu’il n’a d’yeux que pour son algèbre, et le spectre d’un mathématicien reconnu qui fait tout pour que son jeune collègue réussisse là où il a échoué.

Outre le côté légèrement verbeux de son texte, Geneviève Billete nous plonge dans une réalité méconnue avec un talent incontestable pour raconter une histoire. Inspirants, beaux et forts, ses mots nous instruisent et nous captivent, nous divertissent et nous émeuvent. Profitant d’une habile mise en scène, le passé et le présent se passent le flambeau aussi aisément que le monde réel et l’au-delà se tendent la main. Et que dire des fabuleux costumes d’époque qui donnent le ton à la pièce avant même qu’il ne se passe quoi que ce soit.

En travaillant sur les solides fondations imaginées par l’auteure et le metteur en scène, Benoit Drouin-Germain, Benoit McGinnis, Benoit Gouin, Monique Spazziani, Bruno Marcil, Frédéric Paquet, Kim Despatis et Émilien Néron – un jeune acteur qui se débrouille surprenamment bien avec le français normatif – font de « Contre le temps » une œuvre mémorable.

Par Samuel Larochelle, dit le Sage Gamin

Théâtre d’Aujourd’hui – 8 novembre au 3 décembre 2011 (Crédits photo : Valérie Remise)
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mercredi 9 novembre 2011

“L’Affiche” à l’Espace Libre : se faire mitrailler la tête et le cœur pendant 2 heures

Œuvre puissante, œuvre phare, œuvre nécessaire, « L’Affiche » écrite et mise en scène par Philippe Ducros reprend du service à l’Espace Libre jusqu’au 26 novembre. L’œuvre de Ducros est littéralement portée par une distribution, une mise en scène et un texte qui sont à couper le souffle.

Le programme de la soirée affiche très clairement la réalité à la base de l’histoire qui nous est catapultée en plein visage : « En Palestine, lorsque quelqu’un meurt d’une cause reliée directement à l’occupation, des factions s’approprient sa mort, font une affiche avec la photo du martyr et en tapissent les murs du pays. Les murs sont complètement recouverts d’affiches. » La pièce de Philippe Ducros s’ouvre à la mort d’un jeune martyr de 16 ans et se poursuit avec la réaction d’un père qui s’étourdit avec le bruit des machines reproduisant les fameuses affiches, celle de la mère qui transforme son défunt fils en héros, celle du soldat qui a fait traverser une balle dans le corps de l’adolescent, des voisins, eux aussi victimes de leurs méthodes kamikazes, du mur, de l’occupation, des checkpoints, du soleil qui ne se rend plus jusqu’à eux, des oliviers de leurs ancêtres qui sont déracinés des terres qui leur sont volées. Tandis que le soldat israélien est troublé par un geste posé contre le peuple de cette « Palestine qui n’existe pas », un Palestinien participe à la construction du mur séparant son peuple du reste du monde. Puissant paradoxe que voilà.

Au lieu de sombrer dans la facilité d’une écriture manichéenne où le Bien et le Mal sont clairement identifiés, où l’on doit choisir son camp et où les gentils vainquent inévitablement à la fin, Philippe Ducros prend le camp de l’humanité, de ses failles, de ses contradictions, de ses cris du cœur, de ses envies de survie et de vengeance. Ses thèmes sont assurément d’une lourdeur et d’une profondeur abyssale, ses personnages et ses enjeux prennent du temps à s’installer et à se clarifier, mais l’auteur arrive tout de même à nous ébranler et à nous conscientiser en allant au bout de tout ce qu’il veut affirmer dans sa pièce. Du grand théâtre.

Par Samuel Larochelle, dit le Sage Gamin

Espace Libre – 8 au 26 novembre 2011
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Critique de “Mon frère est enceinte” à la Petite Licorne : avant Oprah, il y a eu Johanna

Titre intriguant s’il en est un, « Mon frère est enceinte » est une autre de ces splendeurs que le Théâtre la Licorne présente au public depuis sa réouverture. Écrite, traduite et interprétée par la Montréalaise Johanna Nutter, l’œuvre s’attaque à une série de tabous sur l’identité sexuelle et sur la notion fondamentale de la maternité avec légèreté et émotions.

Jouée à la Petite Licorne (dans sa version originale anglaise les vendredis et en français le reste de la semaine), « Mon frère est enceinte » est l’incarnation de certains enjeux universels ancrés autour des rues Sherbrooke, St-Laurent, St-Viateur et de l’Avenue du Parc : petit coin de la métropole où Johanna a grandi avec une sœur qui se sentait plus garçon que fille et une mère hippie qu’elle a rapidement remplacée en tant que chef de famille. Un jour, la sœur de Johanna lui apprend qu’elle s’est fait enlever les seins et qu’elle a débuté un traitement d’hormones pour changer de sexe. Aimante, ouverte et soulagée de savoir sa sœur plus heureuse en tant qu’homme, Johanna fait le « switch » immédiatement et épaule son frère sans réfléchir. Quelques années plus tard, lorsque son « frère » tombe enceinte (puisqu’il possède encore le sexe féminin), Johanna la dévouée l’accompagne dans cette aventure ô combien particulière.

C’est ainsi que deux ans avant qu’Oprah Winfrey interviewe un homme ayant donné la vie, le « frère » de Johanna avait donné naissance à une petite brune bouclée aux grands yeux bleus.

Seule en scène, Johanna Nutter dessine un Mont-Royal à la craie sur le mur du fond, avant de délimiter son environnement en traçant au sol les grandes artères de son existence. Elle incarne à la fois un frère confus et bourru, une mère qui se détache de ses émotions et de ses responsabilités, ainsi que son propre personnage, une jeune femme dotée d’un amour inconditionnel pour les siens, d’un talent pour le bonheur, d’une ouverture d’esprit qui ne demande aucun effort et de ce besoin irrépressible d’aider et de réunir les siens.

L’histoire de Johanna Nutter sort de l’ordinaire, mais l’actrice et dramaturge arrive à nous la livrer avec une telle simplicité et une telle passion au fond des yeux qu’on a l’impression qu’elle nous raconte quelque chose qui aurait pu nous arriver. Elle nous fait réfléchir et nous réconforte à la fois. Un petit bijou.

Par Samuel Larochelle, dit le Sage Gamin

La Petite Licorne – 7 au 25 novembre 2011
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dimanche 6 novembre 2011

Critique du film “In Time” : beaucoup doivent mourir pour que certains soient immortels

Justin Timberlake joue les acteurs dans un film qui espère plonger les cinéphiles dans une série de réflexions sur la valeur du temps, alors que les minutes, les heures, les années et les décennies y sont utilisées sous forme de monnaie d’échange. Malheureusement, malgré le formidable attrait de sa bande-annonce, In Time n’est rien d’autre qu’un gros pétard mouillé.

Incroyable de constater que la prémisse originale de ce film ait été plombée par le scénariste et réalisateur Andrew M. Niccol, celui-là même qui avait été nommé aux Oscars pour le scénario du Truman Show.

« In Time », c’est une société – étrangement limitée à une seule ville des États-Unis – où les humains vivent jusqu’à 25 ans, avant de voir le décompte de leur dernière année de vie débuter dans un chronomètre en forme de code-barres imprimé sur leur avant-bras. Dans ce monde où votre cœur cesse de fonctionner lorsque vous êtes à court de temps, tous les moyens sont bons pour gagner une heure ou quelques décennies.

Vous aurez compris que le temps, c’est de l’argent, au propre comme au figuré. Non seulement les hommes et les femmes de cette époque doivent se battre contre la montre pour survivre, mais ils doivent également se servir du temps qui leur est alloué pour se payer un café, un billet d’autobus, une chambre d’hôtel ou un changement de zones municipales, qui séparent les différentes classes sociales. Au début de « In Time », le personnage de Justin Timberlake, Will Salas, hérite d’un siècle de vie lorsqu’un ex-millionnaire du temps décide que l’humain ne devrait pas être immortel, qu’il en a assez vu et qu’il préfère lui léguer sa « fortune ». Alors que la police du temps (le time keeper) suspecte Will Salas d’être responsable de la mort de l’homme, Will entreprend un genre de croisade à la Robin des Bois avec la fille d’un riche millionnaire.

Même si la quête de répartition de la richesse est un cliché énorme, la base du scénario de « In Time » me semblait fabuleuse, voire aussi fascinante que l’avait été « Minority Report » de Steven Spielberg, en 2002, alors que la police du futur avait trouvé un moyen de prévoir et d’empêcher les crimes. Là où le film de Spielberg impressionnait grâce à un scénario solide et une réalisation efficace, le film d’Andrew Niccol s’écrase lamentablement.

La réalisation, la trame sonore et le montage de « In Time » sont dignes d’une recette de film d’action supposément construit sur une histoire qu’on souhaite solide. Les questionnements sur la valeur du temps sont abordés en superficie. Les dialogues manquent trop souvent de crédibilité. Les personnages de 25 ans d’âge corporel ne sont pas seulement jeunes, ils sont tous plastiquement beaux. D’ailleurs, en assistant à un échange d’affection entre Justin Timberlake et une actrice dans la vingtaine qui interprète sa mère, impossible de ne pas sentir un début de tension sexuelle entre eux.

Du côté des acteurs, Amanda Seyfried ne fait rien d’autre que d’utiliser ses yeux de biche et ses lèvres pulpeuses, pendant que son collègue Justin Timberlake, juste la plupart du temps, peine à convaincre lors des scènes de grandes émotions.

« In Time » est une foudroyante déception.


Par Samuel Larochelle, dit le Sage Gamin
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