Des amis auteurs qui assistent gratuitement à la moitié des premières de théâtre, un ancien collègue de classe nouvellement nommé critique théâtral au respecté journal Le Devoir, une amie employée depuis des années par un des meilleurs théâtres de Montréal. Tant de personnes choyées et rassasiées par cet art délicieux de la théâtralité.
Un jour, je serai grand moi aussi. Un jour, je n’aurai plus besoin d'espérer les abonnements pour « moins de 30 ans» lorsque je voudrai voir toutes les pièces qui me font envie. Un jour, je regarderai derrière moi en me demandant quelles auront été les semaines où je ne serai pas allé au théâtre, et non l’inverse. Un jour, ma vie ne fera plus seulement ressembler à une pièce de théâtre, elle y passera le plus clair de son temps.
D’ici là, plusieurs pièces m’attendent dans le détour. L’hiver sera-t-il plus riche que la scène de ma vie automnale ? Voyons voir. Petit lexique de mon année théâtrale passée et future.
La saison qui commençait en grand : Abraham Lincoln va au théâtre a débuté mon automne avec charme et volupté. D’abord parce que les billets avaient été gagnés grâce à la présence du Théâtre Pap sur Twitter. Ensuite parce que j’avais couru comme un bon pendant 15 minutes sur la rue Saint-Laurent pour arriver deux minutes avant la levée du rideau, trop occupé que j’étais à déranger l’ordre public en chantant à tue-tête de vieux succès de Céline Dion ou de Marie-Denise Pelletier avec un iPod et un ami chanteur. Puis, surtout... parce que Abraham Lincoln va au théâtre est du théâtre inspiré, incroyablement bien interprété, drôle, touchant, et franchement différent dans sa construction et dans sa mise en scène.
Paris-la-Belle et Eugene Ionesco s’offraient à moi : Paris, premier voyage outre-mer, je suivais les conseils du meilleur ami acteur en prenant 70 minutes de mon séjour pour aller m’asseoir au Théâtre de la Huchette, célèbre lieu théâtral du 5e arrondissement, où Eugène Ionesco présentait ses œuvres mythiques il y a déjà 60 ans. Environ six décennies plus tard, La Cantatrice Chauve et La Leçon y jouent encore, sans interruption. Rigolo, ironique, absurde. Du pur Ionesco. Les vieux théâtres poussiéreux ne m'auront jamais paru aussi accueillants.
Note à moi-même --> toujours écouter mes premières impressions : Le Théâtre de Quat’Sous du TNM est l’exemple parfait de ces instants où l'on devrait toujours se fier à nos pressentiments. Malgré le plaisir énorme que j'ai habituellement en voyant le chant et le théâtre se faire des yeux doux, je n’étais pas tenté à l’idée d'assister aux prouesses de Serge Postigo et d'Émilie Bibeau. Puis, la « faveur populaire » s'est emportée et m’a convaincu du contraire. Une fois sur place : « oh dear God, what have I done ? ». Des personnages au destin dont je me foutais, une œuvre dénuée d’âme, des acteurs qui ne m’ont jamais convaincu. Résultat : l’outrage au théâtre, j’ai quitté à l’entracte…
Quand La Licorne se transforme en Espace GO : Le Théâtre La Licorne, jeune, contemporain, vivant, un de mes préférés, a choisi de prendre congé cette année pour se refaire une beauté. C’est ainsi que j’ai pu me laisser envoûter par Yellow Moon à l’Espace GO. Un spectacle confortable, brûlant, réconfortant, captivant, déroutant, touchant.
Aller au théâtre en prenant son bain : Il fallait bien un auteur à l’écriture hyperactive pour avoir l’idée de présenter sa Martine à la plage dans l’ancienne piscine des Bains St-Michel. Très mauvais pour le dos, mais divertissante à souhait quand dehors il pleut à scieau. Cette nouvelle œuvre de Simon Boulerice m’a donné l’impression de rester en surface trop longtemps, mais elle m’a néanmoins permis de rire, de danser sur mon banc de piscine, et de me décrocher la mâchoire devant le talent de l’actrice Sarah Berthiaume.
Un peu de tendresse, bordel de merde : spectacle-culte du danseur-chorégraphe Dave St-Pierre. On est vendredi, il est 20h, je suis réfugié dans mon cocon d’appartement, habillé d’un pyjama des plus confortable. Puis, Facebook clignote : un ami m’offre un billet pour mon « premier Dave St-Pierre » à vie. Rendez-vous à la Maison de la Culture Frontenac, la pièce débute à 22 heures, et la file de spectateurs est déjà longue, très longue. On vient de loin pour voir St-Pierre. Dix minutes plus tard, ça débute. Ça surprend. Ça fait rire. Ça choque. Mais pas tant que ça. Le spectacle a une réputation de bordel surfaite. Puis, ça se calme, ça s’embellit, ça s’attendrit. Mais pas tant non plus. À vrai dire, cette œuvre est forte. Elle marque son homme. Elle émeut. Elle fait bouger les choses. Mais elle subit les frasques d’un bouche-à-oreille plus grand que nature.
Dieu et Déesse du Nouveau-Monde : Guy Nadon et Christiane Pasquier ont prouvé une fois de plus cet automne pourquoi ils trônent au sommet de leur art dans Le Dieu du Carnage. Les deux acteurs ont été grands, ils ont été beaux, ils ont été follement brillants. Servis par un texte au rythme contraignant (ça passe ou ça casse, à tous les soirs), Nadon et Pasquier étaient accompagnés d’une Anne-Marie Cadieux qui a surjoué admirablement, et par un James Hyndman qui a tenté d'en faire autant, mais sans jamais s’approcher de l’admiration.
Ma petite tradition festive à moi : quatrième présence au spectacle des Contes Urbains, exceptionnellement présentés à la Salle Fred Barry. Pas la meilleure année, pas la plus drôle, pas la plus trash, mais assurément un belle soirée. Mention toute spéciale au conte écrit par Simon Boulerice et interprété par Frédéric-Antoine Guimond : jamais Mariah Carey et les drinks Popers ne m’auront rappelé autant de souvenirs souriants.
Treize à table : Linda Sorgini et Carl Béchard qui "mettent le feu" au Théâtre du Rideau-Vert, Anne Casabonne qui prouve à quel point il est bon qu'elle ait été révélée au grand public dans La Galère en nous servant une amoureuse pleine de vengeance, Évelyne Rompré qui joue la femme saoule la plus drôle, la plus physique et la plus crédible de ma petite humanité, une histoire sympathique, un sens du timing fort appréciable, une charmante soirée entourée d'un public composé à 90% d'hommes et de femmes qui pourraient être mes grands-parents. Toujours amusant.
Treize à table : Linda Sorgini et Carl Béchard qui "mettent le feu" au Théâtre du Rideau-Vert, Anne Casabonne qui prouve à quel point il est bon qu'elle ait été révélée au grand public dans La Galère en nous servant une amoureuse pleine de vengeance, Évelyne Rompré qui joue la femme saoule la plus drôle, la plus physique et la plus crédible de ma petite humanité, une histoire sympathique, un sens du timing fort appréciable, une charmante soirée entourée d'un public composé à 90% d'hommes et de femmes qui pourraient être mes grands-parents. Toujours amusant.
Le spectacle que je suis triste d’avoir manqué : Donka, à l’Usine C, pour sa mise en scène, son inventivité, et tout, et tout.
Tous ceux que j’irai voir cet hiver et ce printemps : la lecture publique de Faire des enfants au Théâtre Quat'Sous, Tom à la ferme, Toxique, et (…) au Théâtre d’Aujourd’hui, La Belle et la Bête, et Hamlet au TNM, Attends-moi à La Licorne itinérante, Les Mutants, Projet Andromaque, et The Dragonfly of Chicoutimi à l’Espace GO, et tant d’autres que La Vitrine pourra m’offrir dans les prochaines semaines.
Les spectacles qui m’ont marqué l’an dernier et qui reviennent bientôt : Le Pillowman et Belles-Sœurs – The Musical.
Les critiques viendront. Oh oui, elles viendront.
Samuel Larochelle, dit le Sage Gamin
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