lundi 5 novembre 2012

Critique « Du Bon Monde » au Théâtre Jean Duceppe : brillant festival du malaise


Après avoir été dépeint dans les films Good Will Hunting et The Departed, le quartier de Southie, tout près de Boston, sert d’univers théâtral à l’auteur américain David Lindsay-Abaire. Abordant de front la pauvreté du quartier, le manque d’éducation et les tracas quotidiens de ses habitants, le dramaturge oblige les spectateurs du Théâtre Jean Duceppe à se positionner à plus d’une reprise sur leur vision des classes sociales.

Construite autour du personnage de Margaret, la pièce « Du Bon Monde » débute avec la mise à pied de cette employée d’un Dollar Store, mère monoparentale d’une enfant attardée et locataire menacée d’éviction par une propriétaire à peine plus fortunée que le reste des habitants du quartier. Poussée par un sentiment d’urgence, désirant trouver un nouveau travail à tout prix, Margaret rend visite à un vieil ami, Mike, un médecin qui a réussi là où plusieurs de ses anciens voisins ont échoué. 

N’ayant pas beaucoup de classe et ne maîtrisant pas toujours ces formidables outils de communication que sont le tact, la politesse et la conscience d’autrui, Margaret accuse Mike avec une série de sous-entendus passifs agressifs en affirmant qu’il n’est plus le petit gars du quartier qu’il était, qu’il regarde son passé de haut, qu’il a honte d’elle et qu’il préférerait l’oublier. Acculé au pied du mur, celui-ci invite sa vieille amie dans une soirée chez lui. En rencontrant la femme de Mike, Margaret livrera quelques secrets du passé de son ex-ami de cœur, mentira pour se sortir de son sort et mettra la bisbille dans le couple.

Tout au long du spectacle, les spectateurs sont partagés entre la gentillesse et l’attitude quelque peu revêche de Margaret. À tout bout de champ, la pièce les oblige à se positionner sur le sort des moins nantis, leurs efforts pour s’en sortir, les choix qu’ils ont faits, le mérite du nouveau fortuné et sur ce qu’ils seraient prêts à faire pour s’en sortir. De toute évidence, David Lindsay-Abaire possède un véritable talent pour écrire le malaise et la confrontation. 

Dramatique à souhait, la pièce est également ponctuée d’une série de passages humoristiques qui font réagir la foule à tous coups. Bien que les personnages interprétés par Chantal Baril et Andrée Lachapelle soient légèrement caricaturaux, ils sont tout de même très drôles. En interprétant Margaret, Josée Deschênes démontre une fois de plus la versatilité de son talent, allant de la colère au découragement, en passant par une succession de vacheries bien senties. 

Durant environ 2 h 30, la pièce souffre de quelques longueurs, ses thèmes bousculeront les certitudes de plusieurs spectateurs, mais le talent généralisé de ses interprètes et la brillance des dialogues valent clairement le détour.

Par Samuel Larochelle, dit le Sage Gamin

Du Bon Monde – 31 octobre au 8 décembre 
Théâtre Jean Duceppe
http://duceppe.com/piece/du-bon-monde


1 commentaire:

  1. Le "mensonge" de Margaret est en fait une vérité car on apprendra à la fin que sa fille handicapée est bel et bien l'enfant de Mike. Ce fait explique l'aigreur de Margaret, alors qu'après avoir laissé Mike quitter son quartier de misère sans assumer son enfant, sans même savoir qu'il en avait un, il refuse même de lui donner l'emploi de gardienne occasionnelle que sa femme avait offert de bon coeur!

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