En invitant la compagnie de danse Cas Public à ouvrir sa saison, l’Agora de la danse donne lieu à une confrontation de tous les instants. Faisant appel à plusieurs danseurs de différents horizons, en plus d’y inclure des artistes de la musique, du cirque et du théâtre, les chorégraphes offrent au public montréalais un spectacle qui part dans toutes les directions.
« Duels » est une ode à la confrontation : les styles de musique qui s’enchaînent (pop aérienne d’Alexandre Désilets, classique, expérimentale, alternative, etc.), les générations qui s’entrelacent, les couples qui s’opposent, l’homme et la femme qui s’affrontent. C’est d’ailleurs avec une série de numéros chorégraphiés avec une bestialité orageuse que débute le spectacle. Virilité, intensité et force brute sont à l’honneur.
Malgré le talent des interprètes, l’intérêt de ces rencontres férocement animales et le grand bonheur de voir des danseuses jouer la tension sexuelle et amoureuse avec une majorité de danseurs franchement masculins, « Duels » prend un petit moment avant de réellement décoller.
Arrive éventuellement une suite de numéros où le chanteur Alexandre Désilets, la comédienne Sylvie Moreau et le comédien circassien Marc-André Poliquin prennent davantage de place, invitant au passage le principe hautement nécessaire de l’intention et de l’interprétation qui se joue ailleurs que dans le corps.
Ironiquement, en assistant à « Junkyard/Paradis » il y a bientôt deux ans, j’avais été à ce point fasciné par le talent d’interprétation des membres de la troupe MayDay que je m’étais interrogé à savoir si la capacité des danseurs d’habiter leurs corps pouvait faire d’eux de meilleurs interprètes que les acteurs. Pourtant, en assistant à « Duels », des comédiens et un chanteur doté d’un talent certain pour la danse m’ont semblé 1000 fois plus captivants à regarder que certains de leurs collègues. Loin de moi l’idée de généraliser : des danseurs comme Merryn Kritzinger, Isabelle Paquette, Cai Glover et Simon-Xavier Lefebvre m'ont séduit à chacune de leurs présences, mais ils sont trop souvent entourés de danseurs qui semblent donner davantage dans l’incarnation cérébrale de leurs émotions.
Un peu brouillon, rempli de bonnes idées, envoûtant par moment, nous laissant indifférents par d’autres, « Duels » a tout de même le mérite de vouloir effacer les frontières de l’art en sortant du cadre avec beaucoup de classe et d'originalité.
Par Samuel Larochelle, dit le Sage Gamin
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