vendredi 13 septembre 2013

« La Vénus au vison » chez Duceppe : la surprise de la rentrée théâtrale ! (CRITIQUE)


Dieu qu’ils auront tort, ceux qui oseront se passer de « La Vénus au vison », parce que le titre de la pièce présentée chez Duceppe sonne comme le nom d’un film cheap des années 70. Non seulement le texte de l’Américain David Ives est-il une véritable surprise d’intelligence et d’humour, mais il est joué par des acteurs qui nous offrent des interprétations de très haut calibre.  

Essayer de résumer La Vénus au vison peut s’avérer aussi simple que complexe, tant les couches de cette histoire sont multiples. Heureusement pour nous, le metteur en scène Michel Poirier et ses deux interprètes, Hélène Bourgeois-Leclerc et Patrice Robitaille, ont tout fait pour en tirer une œuvre d’une clarté saisissante. 

Dans la pièce, Thomas, auteur et metteur en scène ayant écrit une adaptation du roman de Leopold Sacher-Masoch, La Vénus à la fourrure, recherche désespérément une actrice afin de jouer Vanda, une jeune femme du 19e siècle à la fois féminine, sexy, profonde et puissante. Un amalgame qui est, selon lui, impossible à retrouver chez les actrices modernes dont la maturité serait aussi avancée que celle d’une fillette de 6 ans. À bout de ressources, épuisé d’avoir auditionné plus de trente interprètes de suite, il recevra finalement la visite d’une retardataire, elle aussi prénommée Vanda, qui est prête à tout pour obtenir le rôle. 

D’abord peu concluante, leur rencontre se poursuivra sur une enfilade de situations et de réflexions extrêmement lucides, riches et pertinentes sur la séduction, le pouvoir, l’amour, le couple et les rapports de force entre hommes et femmes. En interprétant des extraits de la pièce écrite par Thomas, en s’interrompant pour se questionner et opposer leurs points de vue, et en jouant au même jeu que les personnages de la pièce, l’auteur et l’actrice inverseront les pôles du pouvoir à chaque instant. 

Robitaille et Bourgeois-Leclerc sont ici en parfaite maîtrise de la situation, passant du langage québécois familier au français normatif avec grande dextérité, en plus de maintenir une cohérence infaillible dans leurs dialogues et leurs comportements. 

Absente du théâtre depuis des années, Hélène Bourgeois-Leclerc semble pourtant y avoir passé toute sa vie. Spontanée, un brin malengueulée, ratoureuse, femme fatale et follement déjantée lorsqu’elle interprète Vanda l’actrice, elle est ensuite suave et noble quand elle joue Vanda le personnage, en plus être impériale, mangeuse d’hommes et toute puissante en se glissant dans la peau de Vénus. Les spectateurs ne se sont d’ailleurs pas gênés pour l’applaudir après certaines répliques, spécialement lorsqu’elle changeait brusquement et volontairement de niveau de langage, avec un timing parfait. 

À ses côtés, Patrice Robitaille n’est pas en reste. Tout en nuances, trouvant le moyen de tirer son épingle du jeu en donnant la réplique à une actrice qui brûle les planches, Robitaille joue un homme intellectuel qui cache son insatisfaction face à la vie derrière un voile de fausse confiance et de prétention, à la fois dominé et dominant, fort et vulnérable, profondément mâle et un brin féminin par moment. Un bijou d’interprétation.

La Vénus au vison est un véritable coup de cœur.

Par Samuel Larochelle, dit le Sage Gamin

La Vénus au Vison – Duceppe
11 septembre au 19 octobre 2013

*Crédit photo : François Brunelle



1 commentaire:

  1. Quelle prestation d'Hélène Bourgeois-Leclerc et Patrice Robitaille. Quelle intensité dans l'interprètation. C'est du grand théâtre. A ne pas manquer! Probablement une des meilleure pièce produite chez Duceppe.

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