Le metteur en scène Frédéric Dubois et son Théâtre des Fonds de Tiroirs ont relevé l’ambitieux défi de monter une œuvre de Réjean Ducharme, « Ines Pérée et Inat Tendu », à une époque où la révolte est au goût du jour. Peu importe qu’ils aient clamé les slogans du mouvement « Occupons Montréal » l’automne dernier, qu’ils soient actuellement impliqués dans une lutte à finir contre la hausse des frais de scolarité ou qu’ils s’opposent à l’aseptisation de notre société, nombreux sont ceux qui vont sortir du Théâtre d’Aujourd’hui inspirés et galvanisés.
Les habitués de Réjean Ducharme savent que le travail de l’auteur n’a rien de traditionnel. Plus souvent qu’autrement, le dramaturge québécois exprime un propos avant de raconter une histoire répondant à des conventions dramaturgiques linéaires. Cette fois, l'auteur s'attarde au refus de concéder, de rentrer dans le rang et d’écouter les diktats de la société. Avec Ines et Inat, nulle envie de se censurer ou de s’enliser dans le consensus. Parcourant le monde pour trouver quelqu’un qui voudra les « adopter », les adulescents font la rencontre d’Isalaide, une femme pincée qui délaisse rarement les conventions de la rectitude politique. Les rapports qui les unissent alterneront entre affection et incompréhension, avant de provoquer un changement de cap pour le moins drastique chez tout un chacun.
Il est bien difficile de résumer une pièce de Réjean Ducharme. D’abord parce qu’il est impossible de saisir tout ce que l’auteur nous catapulte au visage (ce qui génère d’ailleurs une certaine forme de plaisir), mais aussi parce qu’il faut vivre Ducharme pour bien comprendre à quel point l’expérience est mémorable. Les niveaux de langage sont exponentiels, les expressions sont déconstruites avec un brio hors du commun, l’anglais québécisé vient flirter avec le français découragé, l’absurde côtoie la critique sociale, la sensibilité embrasse la revendication politique. Bien malin celui qui aura la vivacité d’esprit nécessaire afin de profiter de toute la richesse mise à notre disposition dans « Ines Pérée et Inat Tendu ».
À ce sujet, levons notre chapeau à Frédéric Dubois qui a su diriger cette belle pagaille avec autant de doigté. Bien que la totalité de la distribution soit magnifique, il est nécessaire de mentionner à quel point Catherine Larochelle, Steve Gagnon et France LaRochelle sont fabuleux. Rarement a-t-on vu des acteurs aussi physiques, investis, drôles, sensibles, capables de rendre intelligible un langage aussi particulier et bouillonnants de cette envie de tout casser et de se faire aimer.
À l’image de la plus récente production d’un texte de Réjean Ducharme, « Ha Ha! … » au TNM en décembre dernier, « Ines Pérée et Inat Tendu » est trop longue d’une bonne demi-heure (la pièce dure 2 h 10 sans entracte). N’empêche, la quête d’authenticité des mots de Ducharme et la virtuosité incontestable du Théâtre des Fonds de Tiroirs marquent un trait bien défini dans la chronologie des grandes productions du théâtre québécois.
Par Samuel Larochelle, dit le Sage Gamin
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Les habitués de Réjean Ducharme savent que le travail de l’auteur n’a rien de traditionnel. Plus souvent qu’autrement, le dramaturge québécois exprime un propos avant de raconter une histoire répondant à des conventions dramaturgiques linéaires. Cette fois, l'auteur s'attarde au refus de concéder, de rentrer dans le rang et d’écouter les diktats de la société. Avec Ines et Inat, nulle envie de se censurer ou de s’enliser dans le consensus. Parcourant le monde pour trouver quelqu’un qui voudra les « adopter », les adulescents font la rencontre d’Isalaide, une femme pincée qui délaisse rarement les conventions de la rectitude politique. Les rapports qui les unissent alterneront entre affection et incompréhension, avant de provoquer un changement de cap pour le moins drastique chez tout un chacun.
Il est bien difficile de résumer une pièce de Réjean Ducharme. D’abord parce qu’il est impossible de saisir tout ce que l’auteur nous catapulte au visage (ce qui génère d’ailleurs une certaine forme de plaisir), mais aussi parce qu’il faut vivre Ducharme pour bien comprendre à quel point l’expérience est mémorable. Les niveaux de langage sont exponentiels, les expressions sont déconstruites avec un brio hors du commun, l’anglais québécisé vient flirter avec le français découragé, l’absurde côtoie la critique sociale, la sensibilité embrasse la revendication politique. Bien malin celui qui aura la vivacité d’esprit nécessaire afin de profiter de toute la richesse mise à notre disposition dans « Ines Pérée et Inat Tendu ».
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