mardi 18 janvier 2011

Somewhere : une cinéaste qui se regarde réfléchir


La nouvelle production de Sofia Coppola, Somewhere, est rien de moins qu'un film sans histoire. Non pas que ce film soit carrément dénué d’un propos, mais quand une cinéaste choisit de construire une œuvre autour d’un homme qui se regarde vivre du vide, sans jamais vraiment s'en rendre compte, on est en droit de se poser des questions.

Primé à la Mostra de Venise en 2010, Somewhere déborde de métaphores sur le vide : une voiture qui n’en finit plus de tourner en rond, des danseuses de poteau blondes et plastiques qui en font tout autant, et puis cet homme, campé par Stephen Dorff, qui les observe sans être convaincu que le spectacle soit digne d'être regardé. En suivant peu à peu la non-évolution de cette "histoire", on fait connaissance avec un acteur qui répète sans broncher les réponses que les journalistes et les relationnistes lui mettent en bouche pour combler le manque à gagner. En effet, comment peut-on avoir quelque chose à dire quand on a rien à vivre ? Le seul aspect de sa non-existence qui semble digne de mention consiste en une relation approximative avec une fillette de 11 ans qui ne demande rien de mieux que de passer du temps avec son géniteur, en essayant de l’amuser, de le gâter et d’attirer son attention.

Sofia Coppola enchaine les symboles exprimant le laisser-aller et la dérive contemplative d’un homme à qui elle n'a malheureusement pas offert un minimum de profondeur. There is simply nothing.
Heureusement pour le plaisir des cinéphiles, la jeune Elle Fanning interprète le rôle de la fillette avec une justesse, une légèreté et une vérité qui sont infiniment belles à voir. Il aurait d’ailleurs été fort à propos de la retrouver plus souvent aux côtés de Stephen Dorff, adéquat et somme toute assez bon acteur, à qui l’on a confié la tâche de se laisser être sans trop forcer la note.

Si deux des précédents films de Sofia Coppola, The Virgin Suicides et Lost in Translation, avaient séduit la critique et réussi à trouver un public bien précis, Somewhere ne semble pas prêt d’obtenir pareilles réactions. Pour plusieurs, le dernier film de Coppola se résume en une bulle cinématographique qui impose aux spectateurs d’être les témoins impuissants d’une réalisatrice qui se regarde réfléchir, comme d’autres s’écoutent parler. Pour d’autres, un film comme Somewhere est tout simplement une belle occasion de confirmer leur propre vitalité. 

Samuel Larochelle, dit le Sage Gamin

2 commentaires:

  1. http://www.lemonde.fr/cinema/article/2011/01/04/somewhere-hollywood-capitale-du-spleen-du-toc-du-rien_1460827_3476.html

    RépondreSupprimer
  2. Une critique qui a de la gueule et toute une plume. Intéressant. Un grand merci pour le lien !

    RépondreSupprimer