lundi 17 octobre 2011

« Le désert des solitudes » de Catherine Major ou le talent brut d’une petite fleur du mal

Trois ans après la sortie de Rose Sang, un deuxième album qui avait ravi le public et les critiques un peu partout dans la francophonie, Catherine Major revient nous ravir les oreilles et nous trouer le cœur avec la sublime poésie du Désert des solitudes.

Plus poétique et vachement plus articulée qu’une Cœur de Pirate, proche parente de l’univers mélancolique d’un Alexandre Désilet, cousine musicale d’un certain Pierre Lapointe, de par sa diction chansonnière et sa force de création, Catherine Major possède malgré toutes ces comparaisons un univers musical bien à elle. En écoutant les chansons qui composent le Désert des solitudes, force est d’admettre que le dernier opus de la jeune artiste est une suite logique de l’album Rose Sang. De toute évidence, l’auteure-compositrice-interprète a trouvé une niche qui lui convient parfaitement et son talent en profite pour s’y déployer sans changement de cap à la 180 degrés.

Sa voix grave, douce et solide s’amuse avec la poésie des mots et leurs effets phonétiques comme rares peuvent se vanter de savoir le faire. Les chansons de Catherine Major ne sont jamais tout à fait festives, ni tout à fait légères, mais la plupart d’entre elles nous plongent dans une tristesse qui peut devenir très lourde par moment. Qu’on me comprenne bien, la lourdeur et la mélancolie peuvent être d’une beauté incandescente et Catherine Major possède une capacité inouïe pour nous plonger entre deux mondes, entre le rêve et le cauchemar, la douceur et la gravité, dans un « jardin froid de juillet », au cours « d’une journée de pluie salée », lorsque le jour hésite à se lever et que le spleen de vivre cherche à nous charmer.

Les orchestrations souvent trop présentes auraient tout avantage à laisser place à la simplicité du piano-voix qui permet à la chanteuse d’atteindre une intimité et une vérité qu’elle enterre trop souvent avec ses arrangements, mais en écoutant ses chansons quelques-unes à la fois, et à plus d’une reprise, on les découvre en les laissant nous habiter au lieu de les laisser nous vider. Apprivoisée de la sorte, la misère humaine que semble affectionner Catherine Major nous donne envie de la retrouver sans cesse afin de goûter à une nouvelle parole ou à un nouveau phrasé, comme une petite fleur du mal qui se déploie sous nos yeux.

Par Samuel Larochelle, dit le Sage Gamin
Écoutez un extrait via : http://catherinemajor.com/311352/?cat=15

« Le Désert des Solitudes » de Catherine Major, en magasin le 18 octobre
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1 commentaire:

  1. Tout à fait d'accord! Quelle poésie!
    "Sa voix grave, douce et solide s’amuse avec la poésie des mots et leurs effets phonétiques comme rares peuvent se vanter de savoir le faire. Les chansons de Catherine Major ne sont jamais tout à fait festives, ni tout à fait légères..." Et pour ajouter aux comparaisons : c'est notre Françoise Hardy à nous!

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