mercredi 16 février 2011

17 façons de trouver la femme, dont 9 que je ne veux jamais oublier

Comment faire pour exprimer mes humeurs et mes opinions à propos d’un recueil de nouvelles qui contient quelques parcelles d’imaginaires de certains auteurs que je connais personnellement ? Les connaître fait-il de moi un « critique » partial, complaisant et moins sévère ? Les mots de ces amoureux de la Femme ont-ils réellement ce qu’il faut pour toucher mon cœur d’Homme ?

Pour avoir commenté le travail (écrit et autre) de plusieurs auteurs de Cherchez la femme par le passé, je peux d'ores et déjà affirmer que ma « relation » avec eux ne me rend que plus difficile à toucher. La raison est bien simple : étant donné que je les aime en tant qu’humains, j’ai une peur maladive de ne pas les aimer en tant qu’artistes. Chaque ligne est pour moi une nouvelle opportunité d’être déçu. Jeu risqué s’il en est un… Dans le cas qui nous occupe, le risque de coups et blessures a été réparti parmi 17 auteurs québécois.

En lisant le recueil, j’ai eu droit à une multitude d’impressions qui partaient dans tous les sens : plusieurs textes marquants, de belles surprises, un peu d’inégalité, aucune réelle déception, la découverte de certains auteurs, et l’envie puissante de lire tout ce qu’ont déjà écrit certains autres. Les principaux responsables de mon plaisir des derniers jours sont les suivants :

India Desjardins
Je l’avoue, je suis un fan des premières heures d’India Desjardins. Déjà presque 10 ans à lire tout ce qu’elle fait, depuis les chroniques pour ados qu’elle publiait dans un certain journal en lock-out. Cette fois-ci, la belle India s’est mise en tête d’inventer à quoi ressemblerait le monde « si Dieu avait dit à Ève d’apprendre à être bien toute seule ». Le texte déborde de références et d’expressions modernes à la sauce « débuts des temps pré-civilisation »,  Ève est une femme forte, indépendante, qui se prend en mains, et qui n’hésite pas à s’adresser à Dieu en lui lançant un truc du genre : « Fuck you avec ton pardon, gros débile névrosé », quand celui-ci tente de lui vendre sa salade. C’est original, souriant, léger et pétillant.

Matthieu Simard 
C'était la première fois que je tombais sur cet auteur, et selon ce que je viens d’en lire, ce ne sera pas la dernière. Son personnage est en "amour" avec une blonde qui le domine, qui fait tout pour le changer, et qui ne le laisse tout simplement pas être un gars. Les choses se bousculent. Le lecteur est amené dans une direction rarement empruntée. Au final, est-ce que ça se pourrait que ce soit juste un peu plate d’être un gars ? Voici une des nombreuses questions que se pose l’auteur à l’aide d’une écriture rythmée et très imagée.

Rafaële Germain
Eh oui, je suis de ceux qui sont tombés en amour avec la « chick lit » grâce à la publication de Soutien-Gorge Rose et Veston Noir, le premier succès de Rafaële Germain, publié il y a de cela quelques années. Je suis même de ceux – un peu moins nombreux – qui n’ont pas eu l’impression qu’elle nous avait servi la même recette à succès en ne changeant que les noms des personnages dans Gin Tonic et Concombres. Toujours est-il que dans cette nouvelle, Rafaële nous donne l’impression d'avoir offert une tribune à une héroïne de ses romans précédents, quelques temps après l'avoir envoyée en thérapie. Elle nous sert ici une analyse des jeunes femmes qui prétendent ce qu'elles ne sont pas, des « qu'en-dira-t-on », du « que puis-je projeter aujourd’hui », en passant par « aux côtés de qui mon aura a-t-elle tout intérêt à briller ». Le tout livré à la façon « je suis déjà passé par là, fille ». C’est ô combien lucide, un peu triste, mais si bien écrit.

Guy A. Lepage
Connaissez-vous les règles du poker ? Êtes-vous confus quand vient le temps de comprendre les lois non écrites de la vie de couple ? Et si tout cela était du pareil au même ? Et si l’amour et l’aspect relationnel de notre quotidien se résumaient à une main gagnante, un talent pour le bluff, un sens de l’observation inégalé, et la détermination de finir avec le gros lot ? Voilà un peu le genre de questions que provoque la lecture de Guy A. Lepage. Monsieur l’humoriste-animateur-acteur se révèle un écrivain talentueux, jamais ennuyant, et particulièrement doué pour la maîtrise des petits détails évocateurs. En finissant sa nouvelle, on a envie de lui dire : « à quand un projet de livre ? ». Et pourquoi pas : « à quand un one-man-show ? ».

Claudia Larochelle
« Une journaliste qui œuvre dans le milieu artistique depuis des années et qui a déjà publié dans une quinzaine de recueils. » En apprenant ce détail, une question est venue me brûler les lèvres : « pourquoi ne l’ai-je pas découverte avant ? ». Bien franchement, je n’ai pas du tout envie de résumer la nouvelle de Claudia. Je n’oserais jamais mettre mes mots sur les siens. Parce que les siens sont trop beaux. Parce que son texte est vrai, tendre et émouvant. Parce qu’on y côtoie la candeur, l’horreur et la tristesse. Parce que les images de sa nouvelle me tiennent encore par la main, quelques jours après sa lecture. Parce qu’on en veut davantage : une pièce de théâtre, un roman, n’importe quoi.

Caroline Allard
Voilà que la Mère Indigne rapplique en nous parlant des effets pervers insoupçonnés du gym, de la triste obligation d’y tester notre tolérance à la sociabilité, en nous présentant la pire propriétaire de gym de l’univers et toutes ces petites choses qui côtoient les tapis roulants et les serviettes pleines de transpiration. Ça fait des années que je le dis et le redis, elle l’a l’affaire pour raconter une histoire cette Caroline.

Alex Perron
En plus d’éviter d’aller là où trop de gens l’attendaient dans le détour (une histoire avec un gai), Alex Perron a le mérite de parler de la femme sans donner l’impression qu’il raconte sa vie et sans nous offrir le résultat d’un retour sur soi ou d’une « simple » histoire de mère, d’amie, d'amoureuse ou d’amante. Alex a plutôt opté pour l’originalité en nous proposant une manière révolutionnaire pour se débarrasser de son mari facilement. Un style très personnel, des images évocatrices, de l’humour qui fonctionne, du rythme, une prémisse originale. Voilà de bien bonnes raisons pour remettre ça bientôt.

PODZ
C’est triste, c’est gris, c’est beau. C’est la preuve vivante que PODZ est un artiste au sens large du terme, et que malgré la maîtrise évidente de son métier de réalisateur, l’homme est capable de création et de beauté de bien des façons.

Nadine Bismuth
Est-ce parce que Nadine Bismuth a déjà publié deux recueils de nouvelles en entier (Les gens fidèles ne font pas les nouvelles, Êtes-vous mariée à un psychopathe ?) que son écriture semble la plus mature de toutes ? Que son histoire nous semble si bien installée qu’on la dirait prête à terminer un roman dans les semaines qui viennent ? Sans être la plus originale, autant sur le fond que sur la forme, Bismuth fait tout de même la démonstration évidente qu’elle possède un talent indéniable pour raconter une histoire. Chapeau.

Merci India, d’avoir écouté la femme en toi.

Samuel Larochelle, dit le Sage Gamin

Archives Lecture :

Archives Cinéma :

Archives Danse : 

Archives Musique : 

6 commentaires:

  1. Je comprends que ce soit gênant de critiquer des auteurs que vous connaissez, mais est-ce vraiment possible que tous soient si excellents et sans aucun défaut? Du coup, les éloges prennent un peu l'eau et le doute s'installe...

    Ou bien faut-il comprendre que les auteurs que vous n'avez pas critiqués dans ce recueil (vous dites qu'ils sont 17) ne sont pas bons et que vous vous spécialisez dans les bonnes critiques?

    RépondreSupprimer
  2. D'abord, si vous lisez mes autres billets, vous allez voir à quel point je n'exprime pas seulement du positif dans les critiques.

    En ce qui concerne le billet sur Cherchez la femme, j'ai effectivement fait des choix : parler de 9 textes sur 17. Neuf qui m'ont plu tout particulièrement. Les autres m'ont moins accroché. Ça ne veut pas dire qu'ils sont automatiquement "pas bons" comme vous le présumez.

    Étant donné que je donne dans la critique d'humeurs, et que le tout varie chaque jour, je n'avais pas envie de "descendre" qui que ce soit dans ce projet en écrivant mon billet. Personne ne méritait une démolition en règle, de toute façon.

    Vous savez, il y a de ces jours où l'on préfère mettre de l'avant ce qu'on a aimé, plutôt que l'inverse ou l'équilibre des deux. C'est une question d'humeurs.

    Au plaisir,

    Samuel Larochelle

    RépondreSupprimer
  3. Mon billet précise également que le fait de lire le travail d'auteurs que je connais (loin, très loin de la majorité de ce projet) me rend plus sévère.

    Certains d'entre eux ont donc eu le talent de me rejoindre et de me toucher malgré tout.

    Et je n'ai pas précisé lesquels je connais, ni s'ils font partie des 9 ou des autres. ;-)

    RépondreSupprimer
  4. En tout cas, moi, je suis bien contente d'entendre parler en bien de ma nouvelle! Merci, Samuel, pour avoir pris le temps de parler de Cherchez la femme et de mon texte. :-)

    RépondreSupprimer
  5. This blog is bookmarked! I really love the stuff you have put here.

    cheap nolvadex

    RépondreSupprimer
  6. Mon cher Sam, tu as toujours le don de me transporter avec ton écriture!! Grâce à cette critique si séduisante, je risque bien de t'emprunter le livre qui occupe maintenant une fière place dans ta bibliothèque ;)

    Sarah

    RépondreSupprimer