samedi 19 février 2011

ELLING : Quand Télé-Pirate et Vrak-tv font du théâtre chez Jean Duceppe


Depuis mercredi dernier, le Théâtre Jean Duceppe accueille deux vedettes québécoises, Stéphane Bellavance et Guy Jodoin, qui ont le mandat de s’épivarder avec les mots de la pièce Elling. En plus de constater la volonté évidente du théâtre de rajeunir son public en engageant deux des vedettes préférées chez les jeunes, il faut avouer que sans la présence de ces deux acteurs, Elling aurait peine à mériter le titre de pièce de théâtre qui se respecte.

La prémisse de l'histoire est très simple : deux ex-pensionnaires d’un asile psychiatrique essaient de vivre en appartement en apprivoisant plusieurs concepts qui peuvent nous sembler banals : répondre au téléphone, faire les courses, socialiser avec les voisins, etc. Jusque-là, on est en droit de s'attendre à quelque chose de simple, de drôle et de léger.

Pourtant, seules cinq minutes sont nécessaires pour réaliser que quelque chose ne tourne pas rond. Les décors sont ordinaires, convenus, et peu imaginatifs. Les jeux de lumière, quasi inexistants, et peu pertinents. L’ensemble de la scénographie manque cruellement de vision. Il n’y a rien de beau à voir ou à imaginer dans cette mise en scène signée Monique Duceppe. Et qu’on ne vienne pas me dire que c’est un choix visant à laisser toute la place à la force du texte. Une pièce comme Projet Andromaque peut être décrite ainsi. Pas un truc commercial comme Elling.

Malgré ces nombreuses faiblesses, on essaie de donner une chance à Elling en admettant que les blagues bien pensées et bien placées sont très nombreuses.

Des acteurs du Canal Famille et de Vrak.tv au théâtre, ça donne quoi ?

Étant donné que Stéphane Bellavance est associé aux émissions jeunesse comme Réal-tv et Méchant Changement depuis environ 10 ans, j’étais curieux de constater la qualité de son jeu sur les planches. Force est d’admettre que l’acteur est la plus belle découverte de la soirée. Drôle, attendrissant, énergique, cohérent dans la folie de son personnage du début à la fin, Bellavance agit comme une bouffée d’air frais 90% du temps. C’est d’ailleurs grâce à lui qu’on arrive à garder « l’intérêt » pour le propos.

En contrepartie, Guy Jodoin n’arrive pas à s’en tirer avec autant d’aisance. Malgré l’énorme, que dis-je, le gargantuesque soulagement de le voir plonger dans la pitrerie avec 100 fois plus de retenue que dans Le Bourgeois Gentilhomme, présenté la saison dernière au TNM, Guy Jodoin nous donne l’impression d’être allé fouiller dans ses vieux personnages de Télé-Pirate et de Dans une galaxie près de chez vous pour nous faire rire. Bien entendu, l'acteur possède un talent indéniable pour jouer avec les multiples intonations de sa voix afin de nous décrocher un sourire toutes les 10 secondes. Par contre, les divers tons qu’il choisit d’emprunter dénaturent son personnage, et l’inconstance de son niveau de langage ne démontre rien d’autre que la faiblesse de la direction d’acteurs.

Et puis, il y a les autres… Mireille Deyglun, Donald Pilon et Gabriel Sabourin qui entrent sur scène détachés, nullement habités par leurs personnages, qui lancent quelques répliques avec un sens du timing approximatif, et qui s’en vont. Voilà une belle image de ce qui est offert aux spectateurs. Zéro implication, zéro évolution, et zéro impression d’avoir été ébranlé, intelligemment diverti, ou convaincu que les artisans ont tenté le pari de l’originalité. On rit plus souvent qu'à notre tour, mais les incohérences et les longueurs de la pièce font que les spectateurs quittent le théâtre avec presque rien...

Comme le dit si bien le texte d’Elling : « Plus c’est mauvais, plus ils applaudissent... »

Samuel Larochelle, dit le Sage Gamin


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